AUTO-PORTRAIT D’UN CHEF DE CORPS (1/​3) — Lorsque les rêves deviennent responsabilités

Colo­nel Fré­dé­ric Leborgne —  — Modi­fiée le 21 jan­vier 2025 à 04 h 05 

Web-série — Au mois d’août, nous avions demandé au trois nouveaux chefs de corps de la BSPP de nous décrire leur état d’esprit avant d’entamer leur temps de commandement. Dans le deuxième groupement d’incendie et de secours, le colonel Frédéric Leborgne a pris le commandement, le 9 septembre dernier. Il était auparavant en poste à l’état-major de la zone de défense de Paris.

Ce n’est jamais très simple de défi­nir ado­les­cent ce que l’on sera après 40 ans, de savoir quelles études réa­li­ser, quelle voie et quels conseils suivre. Je me suis, comme tant d’autres, jeté moi aus­si dans une aven­ture incon­nue avec un rêve comme ambi­tion et tel­le­ment d’incertitudes sur ce qu’il advien­dra. Alors que vient de m’être confié le com­man­de­ment du 2e GIS, je mesure aujourd’hui le par­cours entre­pris depuis l’intention brû­lante d’accéder à la BSPP, au choix beau­coup plus réflé­chi de deve­nir chef de corps. Pour ceux qui ne me connaissent pas en voi­ci quelques secrets.

L’imaginaire col­lec­tif mys­ti­fie bien sou­vent les chefs. Il est d’ailleurs cou­rant d’adosser la réus­site pro­fes­sion­nelle à des fac­teurs géné­tiques (on est le
fils de), géné­ra­tion­nels (d’une famille de), sociaux (d’un milieu favo­ri­sé), voire édu­ca­tifs, jus­ti­fiant l’atteinte d’un grade sur la base de cri­tères pri­vi­lé­giés
ou d’appartenance à une caste. Je suis pour­tant issu d’une famille unie et modeste, éle­vé dans un envi­ron­ne­ment mili­taire sous-offi­cier où la mobi­li­té,
vécue par beau­coup comme une contrainte, m’a évi­dem­ment cha­gri­né mais au prix d’une vie riche d’aventures. Comme cer­tains, j’ai long­temps tra­vaillé à l’école à l’économie, par ennui, avant de ren­con­trer tar­di­ve­ment quelques pro­fes­seurs excep­tion­nels dont l’amour du métier et l’investissement ont trans­for­mé mon approche des études. Puis est venu le temps des choix. C’est une nou­velle fois la famille qui m’a conduit à me détour­ner de la faci­li­té, en m’engageant un peu seul dans de hautes études puis le concours de Saint-Cyr plu­tôt que vers les camions rouges pari­siens. Un enga­ge­ment sans garan­tie lorsque l’on a, comme moi, connu les étapes com­plexes de sélec­tion pour rejoindre ensuite la BSPP. 

Le rêve, le pre­mier d’une longue série, s’est tout de même ouvert à Saint-Maur.

Le rêve, le pre­mier d’une longue série, s’est tout de même ouvert à Saint-Maur puis Cré­teil, au sein d’un grou­pe­ment où les sapeurs-pom­piers de tous grades trans­mettent leur savoir avec pas­sion et construisent avec humi­li­té les chefs qui les com­man­de­ront, à la 17e CIS, puis main­te­nant au 2e GIS. Il y a ensuite la famille que vous construi­sez et qui vient enri­chir la pre­mière puis don­ner du sens à votre vie. C’est cette famille deve­nue bien plus grande à
pré­sent qui par amour assu­me­ra onze démé­na­ge­ments en 22 ans, néces­saires pour occu­per des postes expo­sés au centre opé­ra­tion­nel de ges­tion inter­mi­nis­té­rielle des crises ou à l’état-major de zone de défense Paris, gagnant en com­pé­tences dans la ges­tion de crise natio­nale et inter­na­tio­nale et la pla­ni­fi­ca­tion d’événements d’ampleur comme les JOP 2024. C’est enfin cette famille qui vous pousse et vous sou­tient inlas­sa­ble­ment sur le concours de l’École de guerre et son cur­sus de for­ma­tion ame­nant cha­cun d’entre nous vers des postes à responsabilité. 

Si vous me deman­dez aujourd’hui ce qui peut m’amener vers la recherche de res­pon­sa­bi­li­tés, je vous répon­drai la confiance inébran­lable que j’ai dans les hommes et femmes du 2e GIS. Car ce par­cours aus­si exi­geant soit-il, n’est pas le fruit d’un seul homme, mais bien de tous ceux qui, par pas­sion ou par amour m’ont don­né sans savoir, pous­sé sans juger, sui­vi sans repro­cher pour que je puisse à pré­sent faire des autres ma seule et unique priorité.

Pho­to­gra­phies Ser­gent-chef Nicho­las Bady & Pre­mière classe Urvan Carbonnier


À LIRE AUSSI…


Retour en haut