#BrigadeInside — La Défense fait régulièrement son retour dans les colonnes de votre magazine ALLO DIX-HUIT. Et pour cause ! Comme la Brigade, le quartier d’affaires est en perpétuelle évolution : nouvelles tours, nouvel organisme de gestion, nouveaux enjeux et nouveaux défis à relever ne sont que la face visible de la skyline…
Depuis Paris, prenez la ligne 1 du métro en direction de La Défense et descendez à la station « esplanade de La Défense ». Suivez la sortie numéro quatre puis tournez à gauche. Montez les quelques marches qui vous séparent encore de l’esplanade et regardez vers la droite. Devant vous se dresse la tour First, dont la flèche culmine à 231 mètres de hauteur.
Construite en 1974, la tour First est aujourd’hui le plus haut gratte-ciel de France, depuis sa restructuration en 2011. Elle compte 55 étages pour plus de 79 000 m² de superficie. Sa construction, puis sa rénovation comprenant la surélévation de 50 mètres de la tour existante, font de la tour First un symbole de La Défense et de son aménagement du territoire. Néanmoins, son titre de plus haute tour de France lui sera dérobé dans quelques années par The Link, dont la construction a déjà commencé quelques mètres plus loin, de l’autre côté de l’esplanade. Un vrai tour de force.
Remontez l’axe historique en suivant les bords du bassin de Takis, dans lequel se baignent jeunes et moins jeunes les jours de forte chaleur, comme cet été. Quelques personnes barbotant à tour de rôle dans le bassin semblent être une réponse acceptable au street pooling, cette dangereuse pratique consistant à ouvrir les bouches et poteaux d’incendie pour créer des geysers sauvages. À l’heure du déjeuner, nombreux sont les salariés autour des food-trucks, profitant des espaces végétalisés aménagés tout le long de l’esplanade. D’ici à quelques années, l’esplanade tout entière sera d’ailleurs transformée en véritable parc, comme une respiration au cœur de la jungle de béton.
Tout autour de vous, les tours sont plus majestueuses les unes que les autres. La surprenante tour D2, reconnaissable à sa forme ronde en acier croisé, mesure 175 mètres et côtoie l’étonnante tour Saint-Gobain, 167 mètres, dont toute la partie du haut semble coupée, comme prête à glisser dans le vide. La tour Alto, 150 mètres de haut. Plus loin, la tour Légende (165 mètres), avec sa marquise aux airs de vaisseau de science-fiction, avoisine les tours Atlantique (90 mètres), Opus 12 (106 mètres) et Ariane (134 mètres).
Sur votre droite, les tours Cœur Défense culminent à 151 mètres de haut. Ces deux tours jumelles sont reliées entre elles par un immense atrium de verre pouvant abriter deux cathédrales Notre-Dame… Cœur Défense abrite également, pour de vrai cette fois, l’établissement public Paris La Défense (PLD), organisme réunissant les compétences d’aménagement, de gestion, d’animation et de promotion du quartier d’affaires.
Au rez-de-chaussé du Cœur Défense, les baristas d’une célèbre chaîne de café américaine à la sirène verte servent à tour de bras. Il est vrai que, parmi les 180 000 salariés de La Défense, beaucoup consomment de la caféine et de la nourriture… en quantité. Le quartier comptabilise plus de 150 restaurants — dont un de street seafood durable qui vaut vraiment le détour — où se restaurent également quelque huit millions de touristes annuels dans un grand tour de table.
Aux heures de pointe, le tour de chant des travailleurs en costume, des ouvriers, des étudiants ou encore des touristes a quelque chose de musical. Ils déambulent sur le parvis et se croisent dans un harmonieux ballet de souliers, de talons, de chaussures de sécurité et de sneakers. À l’occasion, vous croiserez peut-être tour à tour Marie-Laure Bettoli, directrice de la sécurité de Paris La Défense (lire notre interview ci-après) ou l’adjudant Thibaut Constantin, chef de centre du CS Courbevoie (voir plus bas).
MEF AU VÉLO !
Depuis 2015, la circulation des vélos est autorisée sur le parvis et les zones de circulation piétonne. De nos jours, il est aussi courant de croiser des trottinettes et autres mono-roues jouer des tours sur le parvis, sur lequel la priorité reste donnée aux piétons… Mais attention à vous quand même !
Une fois passée l’araignée rouge d’Alexander Calder — précieux repère pour de nombreux sapeurs cherchant l’état-major du 3e groupement d’incendie pour la première fois — notre promenade touche à sa fin. Vous êtes sur le parvis de La Défense. Face à vous, la Grande Arche : le symbole de La Défense. Un immanquable « cube ouvert » de 110 mètres de haut. Montez ses marches en sillonnant entre les personnes assises et retournez-vous.
Au loin, vous apercevez Paris et l’Arc de Triomphe, dans la continuité du fameux axe historique : Pyramide du Louvre ; Obélisque de la Concorde ; Arc de Triomphe et enfin, Grande Arche. Sur votre gauche, se trouve le CNIT, pour centre national de l’industrie et des techniques. Construit en 1958, ce bâtiment est également un symbole de La Défense. Enfin, sur votre droite, l’immense centre commercial des 4 Temps accueille plus de 230 commerces sur 130 000 m² de superficie. Juste derrière lui, la tour Hekla, mastodonte de verre et d’acier dont la construction s’achève bientôt. Ses 220 mètres de hauteur redessinent avec audace la skyline de La Défense. Un coup “d’Hekla” sur lequel votre magazine ALLO DIX-HUIT ne manquera pas de revenir… Car, vous l’avez compris à chaque description, ce secteur si particulier est aussi un espace opérationnel pluri-potentiel pour les sapeurs-pompiers. De multiples interventions à effectuer tour à tour !
La sécurité de La Défense
TOUR de contrôle !
Nous avons rencontré Marie-Laure Bettoli, directrice de la prévention et de la sécurité de Paris La Défense. Pour ALLO DIX-HUIT, elle livre son analyse du quartier d’affaires.
Quel est votre rôle au sein de Paris La Défense ?
Les missions de prévention et de sécurité de Paris La Défense sont multiples et ont été intégrées dans la loi qui a prévalu à la création de l’établissement au 1er janvier 2018. La direction compte 59 collaborateurs qui veillent quotidiennement à la sécurité et à la sûreté du site. Ils interviennent également en amont sur de nombreux sujets liés à la prévention.
Ces missions recouvrent des aspects très opérationnels (sécuriser les accès à la dalle et dans les locaux propriétés de l’établissement, assurer la surveillance du quartier par des rondes ou via le réseau de caméras de vidéosurveillance, assurer les levées de doute, les primo interventions, l’exploitation des tunnels situés sous le quartier d’affaires, etc.), mais également des missions stratégiques. L’établissement est ainsi partie-prenante du plan de mise en sécurité de La Défense (PMSD) qui pourrait être déclenché en cas d’événement majeur dans le quartier d’affaires.
Qu’est-ce que ce plan de mise en sécurité de La Défense ?
Ce plan, approuvé en 2013, s’attache à favoriser une meilleure gestion d’un événement majeur à La Défense et a pour but de faciliter l’action des services de secours. Pour cela, plusieurs schémas d’alerte prenant en compte tous les acteurs du site ont été arrêtés. Paris La Défense y tient une place particulière. Le PC de sécurité de l’établissement public dispose en effet d’un système de diffusion multicanal, lui permettant ainsi d’envoyer les messages d’alerte à plus de 500 contacts : PC de sécurité d’IGH et d’ERP, responsables sécurité, commerces de proximité. L’accès du site a été travaillé afin de garantir une meilleure accessibilité aux services de secours avec la mise en œuvre d’un plan de gestion du trafic. Paris La Défense a également déployé plusieurs centaines de panneaux d’évacuation afin de guider les usagers du site en dehors du boulevard circulaire, en cas d’évacuation décidée par le Préfet.
Quels sont les grands principes du plan de mise en sécurité de La Défense ?
Deux postures sont prévues dans le PMSD : la mise à l’abri et l’évacuation. La mise à l’abri ou confinement consiste à rester dans le bâtiment dans lequel on se trouve au moment de l’alerte et d’attendre les consignes.
Par évacuation, il faut comprendre la sortie à pied de la zone située sur dalle, en direction des communes situées en périphérie du quartier de La Défense (Puteaux, Courbevoie, Nanterre, Neuilly-sur-Seine). Dans ces conditions, il est exclu d’envisager de reprendre les transports en commun ou son véhicule personnel. Ces actions auraient pour conséquence directe de congestionner immédiatement tout le quartier et de ralentir l’arrivée des secours.
Quels sont vos interlocuteurs du quotidien ?
Ils sont nombreux et leur complémentarité est d’ailleurs un enjeu majeur : la Police nationale, notamment le commissariat de La Défense situé au cœur du site ; les polices municipales des communes de Puteaux et Courbevoie ; la BSPP bien sûr avec un centre de secours à proximité immédiate du parvis ; la RATP ; les deux centres commerciaux (4 Temps et CNIT) ; la Préfecture des Hauts-de-Seine ; les gestionnaires de tours et établissements du quartier.
Les missions de chaque acteur sont connues et partagées, notre enjeu en tant qu’établissement gestionnaire du quartier est d’assurer la coordination et mettre en place une véritable culture de la sécurité commune à toutes les parties prenantes.
Comment fonctionne votre salle opérationnelle ?
Notre poste central de commandement constitue la « tour de contrôle » du quartier d’affaires. Pour cela, nous disposons d’un hyperviseur et d’un système d’aide à l’exploitation depuis fin 2017. Véritable concentrateur de données, l’hyperviseur nous permet de traiter en temps réel l’ensemble des alertes issues de plus de 30 000 capteurs déployés sur le territoire (caméras, barrières, bornes, points d’éclairages, etc.) et de créer des évènements pour la gestion d’une intervention ou le suivi d’une ronde. Il nous assure une vraie traçabilité des actions humaines et des équipements. L’hyperviseur permet également aux agents de disposer de plans d’actions en fonction des typologies d’évènements pouvant survenir dans les tunnels ou dans nos espaces publics.
Comment envisagez-vous l’avenir ?
Nous avons inauguré notre nouveau PC avec l’hyperviseur il y a 5 ans. Nous sommes en train de réfléchir à la façon dont nous pouvons le faire évoluer pour répondre à des besoins pouvant aller au-delà des questions de sécurité et de sûreté. Cet outil pourrait avoir de nombreux usages autour de ce qu’on appelle la Smart City. L’idée est d’ouvrir notre système avec des informations qui n’arriveraient pas directement à nos agents mais qui seraient diffusées à d’autres collaborateurs de l’établissement afin de pouvoir analyser toutes ces données et améliorer la prise de décision. À terme, il s’agit de développer l’analyse prédictive afin d’enrichir notre connaissance et notre maîtrise du territoire.
L’analyse prédictive fonctionne vraiment ?
Bien sûr ! C’est déjà en place ailleurs. Notamment sur de la maintenance. Par exemple, vous avez des équipements qui vont être défaillants très régulièrement et l’outil va permettre de vous alerter pour les remplacer avant la panne. Mais cela pourrait aller bien plus loin en termes de sûreté et de sécurité, tout en restant dans le cadre légal.
Propos recueillis par SGT NB
Les pompiers de La Défense
TOURS de garde !
Pour assurer la lutte contre l’incendie et la protection des biens et des personnes, le quartier de La Défense peut notamment compter sur l’expérience des pompiers du centre de secours Courbevoie.
“Au centre de secours, nous entretenons une culture de La Défense, confie d’emblée l’adjudant Thibaut C.. Concernant le secteur, il est essentiel que chacun soit un sachant, du conducteur au chef de garde. » Le sous-officier, chef de centre du CS Courbevoie depuis le mois de juin 2021, sait de quoi il retourne. « Lorsque je suis arrivé à Courbevoie en tant que sous-chef de centre, poursuit-il, j’étais plutôt rassuré d’avoir dans mon engin des pompiers qui connaissent bien le quartier et en maîtrisent les nombreux accès. » En effet, les hommes du centre de secours ont une particularité bienvenue en compagnie d’incendie et de secours : l’ancienneté.
La moyenne d’ancienneté de service des militaires du rang du CS Courbevoie « est de six ans environ, indique l’adjudant. Nous avons aussi trois caporaux-chefs de plus de quinze ans de service, ce qui est assez inhabituel de nos jours dans un CS, mais vraiment précieux en ce qui concerne Courbevoie ». Les 54 hommes du centre de secours arment chaque jour cinq engins.
Le centre de secours est doté des véhicules de secours et d’assistance aux victimes numéros 437 et 213, du premier secours évacuation 232, du fourgon pompe tonne léger 121 et du véhicule protection signalisation (VPS) numéro 3. Au total, « nous sommes 18 sapeurs-pompiers de garde chaque jour, indique l’adjudant C.. Nous n’avons pas d’échelle, mais il y en a tout autour de nous dans le carré des neuf ! J’ajouterais que le VPS a une mission secondaire, en cas de renfort sur La Défense : il guide les engins des autres CS sur les lieux de l’intervention ». En effet, si les engins savent retrouver l’état-major du 3e groupement, donc le centre de secours, il peut être beaucoup plus compliqué de trouver le bon accès, qui plus est dans l’urgence. L’emploi du VPS comme guide semble donc tout à fait judicieux, dans ce secteur qui doit être appréhendé en quatre dimensions.
« La Défense est un secteur très particulier, analyse le chef de centre. En quelques années, plusieurs tours sont encore sorties de terre, et d’autres projets sont en développement… Le quartier est en perpétuelle évolution. L’engagement des engins est souvent complexe, et c’est pour cette raison que nous avons fait un gros travail de mise à jour et d’évolution des parcellaires du secteur. » Ces parcellaires spécifiques sont pensés en “couches” successives afin de mieux se repérer dans l’espace. Par exemple, sur un plan classique en deux dimensions, il est difficile de repérer à quel niveau se situe une bouche d’incendie. Ce problème est résolu avec les nouveaux plans, pensés par accès. Ces parcellaires spécifiques devraient faire leur apparition dans les engins dès la rentrée 2022.
7 410 DÉPARTS EN 2021
Soit environ 20 départs de secours par jour. Un rythme plutôt soutenu, qui favorise la connaissance du secteur. « Au bout d’un moment, on maîtrise bien les accès, reconnaît le caporal Antoine R., affecté au CS depuis plus de dix ans. Mais il faut rester vigilant et bien entretenir notre culture de La Défense. »
Le saviez-vous ?
Mais pourquoi le quartier d’affaires se nomme-t-il La Défense ?
Le quartier tient son nom d’une sculpture de Louis-Ernest Barria réalisée à l’occasion d’un concours organisé en 1879 par Barthélémy Forest, alors membre du conseil du département de la Seine. L’œuvre vise à célébrer la résistance des soldats français lors de la guerre de 1870, contre la Prusse.
Inaugurée en 1883, « La Défense de Paris » mesure 5,5 mètres de haut, pour plus de trois tonnes de bronze. Trois symboles composent l’œuvre de Louis-Ernest Barria. D’abord, une femme couronnée, debout devant un canon, représente la ville de Paris et semble défier l’ennemi en tenant le drapeau de la République. À ses côtés, un jeune soldat blessé la défend farouchement, fusil à la main. Derrière eux, une petite fille assise, pieds nus, évoque les souffrances endurées par la population.
Après quelques déplacements, « La Défense de Paris » est aujourd’hui exposée en plein centre du quartier d’affaires, à quelques mètres de la tour Cœur Défense.