Retour d’inter — Voici le récit d’un incendie dans la cité Gustave Appert, à Villeneuve-la-Garenne (92) par les intervenants. Un feu d’appartement se déclenche dans la nuit du 17 au 18 mars, venant perturber le sommeil des habitants. Alertés, les sapeurs-pompiers de Paris du secteur Gennevilliers se rendent rapidement sur les lieux pour s’attaquer au sinistre.
“Le 18 mars, aux alentours de minuit, je suis réveillé par le ronfleur de la VL OGC, témoigne le capitaine Simon Creignou, officier de garde de la 27e compagnie. À ce moment-là, je ne sais pas encore qu’il s’agit d’un départ pour feu. En descendant, je vois l’agitation dans la remise et comprends que je ne suis pas le seul à partir. Il s’agit vraisemblablement d’un départ pour feu. Cette information est confirmée au PVO dans la foulée. »
L’officier de garde de la 27e compagnie fait un point avec le lieutenant Ugo Barrier, chef de garde du jour au centre de secours Gennevilliers. Il s’agit de la cité Gaston Appert de Villeneuve-la-Garenne, bien connue du secteur. Rapidement, les engins sortent
de la remise et l’OGC fait un point de situation de manière précise avant de sauter dans la VL. Il n’a pas encore la notion qu’il sera rapidement complété par un groupe habitation.
« Généralement, j’ouvre la fenêtre en m’approchant des lieux d’un sinistre, afin de constater s’il y a une odeur de brûlé. Mais là, rien ! relate le capitaine. Au détour d’une grande avenue du secteur, j’aperçois un panache qui se développe au loin, au-dessus des toits. Il y a bien un incendie dans le coin. » Aussitôt présenté, l’OGC perçoit une certaine agitation chez les habitants, encore ensommeillés. De fait, trois fenêtres sont déjà allumées au premier étage ! Afin d’attaquer le sinistre, les équipes établissent prestement l’alimentation en pied de cage d’escaliers. Hélas, ils sont ralentis dans leur manœuvre car celle-ci n’est pas encloisonnée : des flammes menaçantes sortent de leur volume initial… Au même moment, « je fais un point avec le lieutenant Barrier. Il me précise qu’il vient de faire établir un deuxième moyen hydraulique depuis la rue pour réaliser une attaque d’atténuation. Celle-ci permet d’avoir un effet direct sur le sinistre, et facilite par-là la progression des équipes dans la cage d’escaliers » observe le capitaine.
Lors de ce point, le lieutenant Barrier décide de demander un renfort habitation pour adapter la réponse opérationnelle à l’incendie. Au même instant, le lieutenant apprend qu’il est impossible de faire descendre l’ascenseur. De potentielles victimes sont restées bloquées à l’intérieur. L’officier de garde compagnie lui annonce qu’à la suite de cette manœuvre de sauvetage, il prendra le Commandement des opérations de secours (COS). L’ascenseur est finalement ramené au premier étage, et ses portes sont forcées par les sapeurs-pompiers. Un couple de personnes âgées en arrêt cardio-respiratoire (ACR) en est extrait par les équipes du fourgon de Saint-Ouen alors même qu’ils traitaient déjà une fuite de gaz enflammée sur le palier. Les deux victimes sont prises en charge et réanimées sans délai.
Je prends le commandement des opérations de secours. « Alors que ce n’était pas le cas au départ, on voit que ça brûle aussi en courette maintenant. Les sauvetages sont réalisés un à un, et les mises en sécurité, effectuées par l’EPAN Saint-Denis, s’enchaînent. » Simultanément, la première équipe du fourgon d’appui Gennevilliers va chercher trois personnes bloquées dans leur appartement du deuxième étage, au moyen de l’échelle à coulisse. Ils poursuivent leurs sauvetages jusqu’au troisième étage en prolongeant leur ascension au moyen de l’échelle à crochets. Une fois dans l’appartement concerné, le chef d’équipe ordonne la mise en place d’un point fixe humain afin de sortir une femme au moyen du Lot de sauvetage et de protection contre les chutes (LSPCC).
Au capitaine d’ajouter : « Rapidement appuyé par les officiers de garde de la 9e et 26e compagnie, je les désigne chefs de secteurs afin qu’ils supervisent les opérations de reconnaissance, les multiples mises en sécurité ainsi que l’optimisation de la ventilation ». L’OGC de la 27e compagnie, appuyé par le lieutenant-colonel Maxime Gallou (officier supérieur du 3e groupement), constate que les moyens mis en œuvre sont adaptés à la maîtrise du feu.
De plus, une action rapide sur ce dernier a permis de calmer la situation. « Combinée à l’attaque directe sur le foyer, l’attaque d’atténuation menée dès les premiers instants a eu un effet direct sur le sinistre. Elle a probablement facilité les sauvetages dans l’ascenseur », analyse le capitaine.
À 2 h 31, le message « feu éteint » est confirmé par le capitaine ! Le couple de personnes âgées en ACR a été réanimé. Le dénombrement terrain définitif fait état de six sauvetages, sept mises en sécurité et, fort heureusement, aucun décès. Des conditions initiales d’engagement compliquées certes, « cependant, on en garde tous un souvenir univoque : l’opération s’est bien déroulée ».
TROIS QUESTIONS AU CAPITAINE CREIGNOU
Le capitaine Simon Creignou, officier de garde de la 27e compagnie, retrace cette intervention. C’est l’occasion de préciser quelques éléments décisifs.
Avez-vous rencontré des difficultés quant à la configuration bâtimentaire ?
nous avons en effet rencontré quelques difficultés une fois arrivés sur le terrain. Cette intervention s’est déroulée à Villeneuve-la-Garenne. Nous avions déjà réalisé par le passé quelques opérations dans cette cité. Nous connaissions déjà les quelques difficultés relatives au terrain. On l’appelle la cité du « fer à cheval », c’est-à-dire que cette résidence est construite en arc de cercle, presque fermé. Il n’y a qu’un seul accès : il s’agit d’une place qui permet d’accéder aux différentes entrées des immeubles. En plus de l’étroitesse de ce passage, il y a des travaux sur le devant de cette place, si bien que nos MEA n’ont pas pu s’engager par l’intérieur, dans la place, afin d’accéder à la façade. De plus, les palissades qui entourent ce chantier empêchaient les sapeurs-pompiers d’accéder au barrage central de gaz. Le chef d’agrès du BEA a donc forcé la clôture afin de barrer le gaz.
Et du point de vue opérationnel, avez-vous rencontré des obstacles ?
mes équipes ont eu des difficultés à créer l’exutoire, permettant d’évacuer les fumées. Nous avons eu du mal à y accéder car celui-ci était protégé par une porte grillagée. Ce dispositif de sécurité est fréquent dans les cités, il empêche les gens d’accéder au toit. Après quelques efforts, nous avons réussi à forcer le grillage et à créer cet exutoire, lui-même situé derrière la machinerie ascenseur. Celui-ci fonctionnait, mais assez mal étant donné qu’il y avait encore de gros bouchons de fumée. Les appartements du dixième au douzième étage étaient particulièrement enfumés.
Que retenez-vous de cette intervention ?
cette opération s’est bien passée, alors que dès le début, il y avait quelques éléments qui auraient pu nous poser de réels problèmes. Je suis fier de mes équipes, cette intervention restera gravée dans nos mémoires