Grands formats — Processus d’acquisition des savoirs, savoir-faire et savoir-être liés à un emploi, la formation permet à chaque individu de développer une ou plusieurs compétences. Toujours plus soucieuse quant à la qualité de sa réponse opérationnelle, la brigade de sapeurs-pompiers de Paris articule et réajuste en permanence le cursus de formation dédié à son personnel, chaque jour plus sollicité. De la formation initiale, aux stages permettant d’occuper les fonctions les plus élevées, la BSPP s’appuie sur une structure cohérente, adaptée et pragmatique.
L’ORGANISATION GENERALE DE LA FORMATION A LA BRIGADE
La brigade de sapeurs-pompiers de Paris détient la particularité de former plus de la moitié de son effectif chaque année, et pour la plupart en interne. Lors de ces actions de formation, les hommes et les femmes acquièrent et développent de nouvelles compétences dans l’objectif d’évoluer au sein de l’Institution ou de se spécialiser dans leur emploi du quotidien. La formation interne émane du bureau ingénierie de la formation (BIF). Véritable échelon central, il conçoit et écrit la doctrine de formation, définit et organise les examens, et enfin, prépare les candidats de la Brigade aux différents concours « officiers ».
La conduite est réalisée par une quinzaine de centres de formation. Ces derniers sont permanents, isolés ou de circonstance. Le groupement formation instruction et de secours (GFIS), par le biais de ses deux compagnies (CDF 1 & 2), organise les actions définies par le BIF et en assure l’exécution. C’est au sein de ce groupement que sont délivrées les formations dites de « cursus » telles que celles acquises par les nouvelles recrues, les cadres mais aussi les futurs conducteurs d’engins-pompe. Le GFIS, certifié ISO 9001 depuis 2010, dispose d’infrastructures propres et de personnel lui permettant de mener à bien sa mission.
Le groupement des appuis et de secours (GAS), unité englobant l’ensemble des spécialités de la Brigade, assure quant à lui, la conduite des stages de spécialités ou d’adaptations à l’emploi pour lesquels des agréments sont détenus par l’Institution. Les centres de formation dits « isolés » ou de « circonstances » ne sont, par définition, pas rattachés aux structures précitées. Les unités, bureaux ou services agissent au profit du personnel de la Brigade, en fonction des besoins exprimés, en formant aux modules spécifiques d’adaptation à l’emploi (santé, prévention, télécommunication, etc.). Les sections formation instruction des six groupements ont également la charge de préparer leur candidat à l’avancement mais aussi à la reconversion. Elles sont en outre, chargées de contrôler l’entraînement des unités d’incendie via un programme complet de maintien et d’actualisation des acquis professionnels. Il permet d’entretenir les compétences individuelles de chaque personnel par un face-à-face pédagogique avec un sapeur-pompier qualifié. Ce maintien des acquis revêt une importance capitale car il est, avec la préparation opérationnelle, le garant de l’efficacité et de la sécurité du personnel en intervention. Enfin, les cellules formation instruction des unités (CFI) organisent la préparation opérationnelle permanente et préparent leurs candidats à l’avancement.
LA MISE EN FORMATION
La section mise en formation du bureau organisation ressources humaines répond aux besoins des groupements qui doivent être opérationnels dans de nombreux domaines par le biais de formations internes et externes. Son domaine de compétence concerne tous les sapeurs-pompiers, (militaires du rangs, sous-officiers, officiers) issus de la filière « SPP » ou des filières de « spécialistes ». Le budget alloué pour le plan de formation, également géré par cette section a pour but de trouver à l’extérieur les stages qui ne peuvent pas être suivis à la Brigade.
Commandé par un officier titulaire d’une formation en ressources humaines, elle se scinde en trois grands groupes et un pool.
Le groupe mise en formation interne (MEFI), est chargé de la mise en formation des sapeurs-pompiers filière « pompier » pour toutes les formations internes liées au calendrier des actions de formation et à l’avancement telles que le peloton des élèves caporaux, les épreuves d’accès pour devenir sous-officier, etc. La partie secourisme est également placée sous sa responsabilité, pour l’inscription et le suivi des stages premiers secours en équipe, formateur de formateur, BNSSA*, formations continues, en étroites relations avec le CFSAV*.
Le groupe mise en formation externe (MEFE), répond à l’organisation des formations d’adaptation, présentations aux différents examens du permis de conduire ainsi qu’aux stages techniques tels qu’échelier, conducteur engin-pompe… Il s’agit ici de compléter le cursus pompier en formant le personnel dans différents domaines : IMP*, ELD*, SIA*, SIS* aux risques chimiques, radiologiques, cynotechniques ou encore de répondre aux besoins en formations diverses : préparation au TOEIC, instruction aux tirs, BPJEPS ANN (maître-nageur sauveteur), etc. Les relations avec, les SDIS*, la PP* et la DGSCGC* sont fines et indispensables.
Le groupe mise en formation des spécialistes (MEF/SPE) travaille en collaboration avec la DRHAT*, pour placer le personnel spécialiste sur les différents stages dans les écoles de la Défense. Elle formule par ailleurs, les expressions de besoins en formation de cursus et d’adaptation des années à venir.
Le groupe budget, prépare quant à lui, le plan de formation, suit le budget alloué par le BPFB* et supervise le traitement de toutes les formations ENSOSP* (PRV2*, RCCI*, RAD 4* RCH4*…).
Enfin, un pool, regroupe toutes les informations et travaille au profit des différentes sections. Qu’ils s’agissent de requêtes, de mises à jour de la base RH, ou de l’édition des diplômes et attestations.
Les dossiers les plus sensibles sont suivis par une section commandement chargée des dossiers relatifs à la formation humaine des polytechniciens, au changement d’arme au profit des forces spéciales, aux épreuves de sélection professionnelle, aux stages officier de garde compagnie…
PARCOURS DE MDR… ÉQUIPIER EXPLORATION LONGUE DUREE (ELD)
Quand un jeune militaire du rang devient spécialiste en ELD
« Je voulais avant tout me dépasser et contribuer à aider le plus de victimes possible ! ». C’est en ces termes que le première classe Jérémy Kettemeyer, du centre de secours Blanc-Mesnil, explique les raisons qui l’ont motivé à accéder aux fonctions d’équipier ELD.
Deux ans de service minimum, des résultats sportifs excellents, un test écrit validé et un parcours physique impliquant des reconnaissances en situations concrètes : tels sont les prérequis indispensables pour intégrer la formation.
Après s’en être acquitté, le première classe Kettemeyer a donc suivi un stage intense de deux semaines. Au programme : de la théorie sur les matériels spécifiques, les concepts et techniques d’engagement ; mais surtout de la pratique, incluant de nombreuses manœuvres, reconnaissances en situations extrêmes, sauvetages en milieux confinés…
En outre, la fonction ELD implique d’intégrer le groupe d’extraction spécialisé (GES). À ce titre, un instructeur de la BRI* consacre une journée sur l’extraction d’une victime sous la menace possible d’un sur-attentat. C’est après une initiation à l’hélitreuillage que le candidat se présente face à l’ultime épreuve validant, ou non, sa qualification d’équipier ELD. Un parcours sportif suivi d’un sauvetage en fosse et d’un hissage de tuyaux en haut d’une tour d’environ 20 mètres, permettent aux examinateurs de tester le stagiaire. Les deux semaines éprouvantes s’achèvent alors devant un jury jaugeant les motivations et les qualités intrinsèques de chacun des postulants.
PARCOURS D’OFFICIER… FORMATION AUX FUTURS COMMANDANTS D’UNITE (FFCU)
Dessine-moi un feu, je l’éteindrai
Depuis le jour où René Dosne a transformé ses dessins artistiques en croquis techniques, la brigade de sapeurs-pompiers de Paris s’appuie sur des dessinateurs opérationnels pour prendre en compte et analyser les plus importants sinistres dans leur ensemble. Mais comment devient-on une « mine » d’information ?
Avant toute chose, il faut être certifié de la qualification « chef de garde incendie » et justifier d’une bonne expérience de terrain.
Passé ces prérequis, deux niveaux de compétence doivent être validés : le dessinateur opérationnel (DO) de niveau 1 et le DO2.
Le DO1 : deux mois durant, le candidat est testé sur ses capacités de vision et de retranscription en 3D. En utilisant l’e‑learning, des échanges réguliers sont opérés entre un dessinateur confirmé et le stagiaire. Dès que cette première étape est validée, la deuxième phase commence…
Le DO2 : une semaine pour acquérir les techniques permettant de faciliter la « compréhension bâtimentaire ». Il s’agit concrètement d’identifier et de traduire les problématiques afin d’aider le commandant des opérations de secours et/ou l’officier poste de commandement dans leurs prises de décisions tactiquo-techniques. Par l’illustration des puits de lumière, des ventilations basses et hautes ou des accès, le DO doit être rapidement capable de renseigner un maximum d’éléments sur un plan simple, mais efficace.
Un examen final sanctionne le candidat, alors placé dans les conditions du réel. Confronté à un feu, il doit réaliser un croquis complet en 20 minutes, tout en respectant la charte au maximum. Il expose enfin les problématiques de l’intervention à un officier du bureau planification opérationnelle.
A l’heure actuelle, la brigade compte sept dessinateurs opérationnels dans ses rangs.
PARCOURS D’OFFICIER… FORMATION AUX FUTURS COMMANDANTS D’UNITE (FFCU)
Bien connaître, pour bien commander…
Placée sous la responsabilité du centre de formation des officiers (CFO), et en complément de la formation effectuée dans les écoles d’application comme celle du Génie à Angers, cette FFCU permet aux futurs commandants d’unité (CDU) de mieux appréhender les spécificités de la Brigade, en termes de fonctionnement, de gestion du personnel, de conservation du patrimoine… Ainsi, des intervenants de la majorité des entités de la BSPP se relaient durant onze jours pour présenter chacune de leurs prérogatives. Tous les domaines qu’un CDU se doit de maîtriser durant son temps de commandement sont au programme : détachements, positions statutaires, renouvellements de contrat, formations, communication, chancellerie, comptabilité, responsabilités pénales, etc. Pour finir, un entretien avec le général, commandant la BSPP, permet d’appréhender sa vision et ses objectifs à court, moyen et long terme.
LES NIVEAUX DE RESPONSABILITE ET DE FORMATION LIES AU CURSUS PROFESSIONNEL
Les militaires du rang :
N 1 : sapeur servant ;
N 2 : chef d’équipe, gradé de jour ;
N 3 : chef d’agrès, gradé d’encadrement.
Les sélections et les formations se font exclusivement au sein de la BSPP.
Les sous-officiers :
N 4 : chef d’agrès, adjoint chef de groupe ;
N 5 : chef de garde, chef de centre, chef de groupe.
Les sélections et les formations se font exclusivement au sein de la BSPP.
Les officiers :
N 6 : officier chef de garde, responsable d’un service en unité opérationnelle ;
N 7 : officier de garde compagnie, commandant d’unité ;
N 8 : officier poste de commandement, officier d’état-major ;
N 9 : officier supérieur de garde groupement, commandant de groupement ;
N 10 : officier colonel de garde, expert haut niveau.
Les formations sont dispensées en partie dans l’Armée de terre et en partie à la BSPP.
SERGENT-CHEF LAURA MANZONI, PREMIERE FEMME CHEF DE SECTION AU FORT DE VILLENEUVE-SAINT-GEORGES
« Nos journées de formateurs et chefs de section sont rythmées tel un centre de secours ! »
« Être la première femme « chef de section » au sein du groupement formation instruction et de secours (GFIS) n’a jamais été un objectif majeur pour moi, affirme le sergent-chef Laura Manzoni. Je suis à ce titre plutôt mal à l’aise quant à ce qualificatif… Néanmoins, je reste consciente que cela traduit une évolution importante et nécessaire pour l’Institution. Plus qu’une vitrine politique, un tel poste occupé par une femme permet non seulement aux jeunes recrues masculines d’appréhender encore mieux les conditions d’une vie mixte, dans leur futur centre de secours, mais aussi aux féminines, qui pourraient douter, que l’on peut arriver à de telles responsabilités. »
Incorporée en janvier 2004, le sergent-chef Manzoni s’appuie sur une carrière de plus de quinze ans de service, dont près de douze passés en compagnie d’incendie. Épanouie sur le terrain, elle découvre par la suite l’univers plus administratif de la section opération instruction du 2e GIS* en 2017. Un an plus tard, le commandement lui propose un poste de chef de section au GFIS. Elle accepte immédiatement, honorée par cette marque de confiance.
« J’ai tout de suite adoré !, assure Laura, toujours aussi enthousiaste aujourd’hui. Honnêtement, je craignais être vue comme « la femme » plus que le sergent-chef, mais j’ai tout de suite été rassurée. Accueillie par mes gradés, mes pairs et mes supérieurs comme un chef de section lambda, j’ai pu appréhender mes prérogatives sereinement. Tout s’est ensuite enchaîné jusqu’à l’arrivée de ma première section. Entendre 40 sapeurs répondre « bonjour chef » d’une seule et même voix au rassemblement restera un moment particulier… Quelle responsabilité ! Avoir à sa charge la formation de jeunes désirant devenir des sapeurs-pompiers de Paris opérationnels, oblige à toujours rester exemplaire, attentive et rigoureuse, tout en générant cette adhésion et cette cohésion propres à la Brigade. Nos journées de formateurs et chefs de section sont rythmées tel un centre de secours. Encadrer les séances de sport, les manœuvres, l’étude des règlements ou les problèmes du quotidien nous impose une remise en question permanente, tant sur le fond que sur la forme. »
Au terme de sa première année à la tête d’une section et après avoir vu passer près de cinq contingents, le sergent-chef Manzoni confie avoir pris conscience de deux choses : dans un premier temps, ce poste est incontestablement « formateur » dans une carrière. Enfin, la présence d’un binôme mixte au sein d’une équipe de commandement est une plus-value évidente pour l’institution. Outre le fait de rassurer les recrues féminines, il a pour grand intérêt d’aborder au plus juste la vie sociale en caserne.
LE PILOTAGE
Un comité de pilotage (COPIL FORM), organisé au plus tard au début du mois de juin, réunit l’ensemble des acteurs de la Brigade afin de recueillir les informations susceptibles d’impacter de manière significative les programmes ou le parcours de formation du personnel. À la suite de ce comité, un procès-verbal et un relevé des décisions sont élaborés. Ce préambule est l’étape nécessaire pour la préparation du comité de direction (CODIR FORM) qui se tient en octobre de la même année. C’est lors de ce CODIR que toutes les propositions sont soumises à la validation du général, laissant ainsi le temps aux différents services de conduire leur travail d’ingénierie ou d’analyse.
Inspiré directement des procédés de management par la qualité, le pilotage de la formation permet :
- l’évaluation permanente des actions et des parcours de formation par l’exploitation annuelle des retours d’expérience ;
- le suivi par les sections ingénierie du BIF des décisions officialisées en COPIL et CODIR FORM ;
- Le suivi de la réalisation du calendrier des actions de formation (approche quantitative) et de la performance des centres de formation interne (approche qualitative).
POUR ALLER PLUS LOIN — LES TEXTES DE REFERENCE
Le Code de la défense précise que « la BSPP est habilitée à dispenser la totalité de la formation spécifique de sapeur-pompier à l’ensemble de son personnel et assure la formation générale des militaires du rang et des sous-officiers. Elle est agréée comme organisme de formation par arrêté du ministre de la Défense. Pour répondre à des besoins spécifiques à la formation de sapeur-pompier, ne relevant pas du ministre de la Défense, la Brigade peut être agréée par le ministre de l’Intérieur. Elle peut également appliquer les dispositions contenues dans les guides nationaux de référence prévus par l’article R 1424 – 52 du CGCT pour les formations pour lesquelles l’agrément n’est pas sollicité ».
Outre le code de la Défense, l’instruction des soldats du feu est régie par plusieurs textes publiés au journal officiel, notamment le décret 2008 – 1219 en date du 25 novembre 2008 codifie, l’instruction ministérielle n°953 relative a la formation individuelle des militaires du rang, l’instruction ministérielle n°954 relative a la formation individuelle des sous-officiers et l’instruction n°474/def/rh-at relative au domaine de spécialité « sécurité ». Au sein même de notre institution, deux bibles font référence a ce qui concerne d’une part l’organisation de la formation liée au cursus professionnel (ins 6.1) et d’autre part celle spécifique à l’emploi (ins 6.2).
LE CALENDRIER DES ACTIONS DE FORMATION
Véritable outil de programmation, le calendrier des actions de formation et le plan de charge sont les deux documents fondamentaux du système de formation BSPP. Diffusés chaque année en novembre, ces textes recensent respectivement l’ensemble des actions de formation conduites en interne ainsi que les charges qui en découlent comme celles liées aux fonctions d’instructeur, d’examinateur, de correcteur, etc. Se fondant exclusivement sur la prévision des effectifs à former et de leur répartition par groupement, le calendrier des actions de formation permet de mesurer les capacités annuelles des différents centres de formation internes. Son suivi est assuré par le bureau ingénierie formation, en liaison avec le BORH, la section mise en formation et les centres de formation de la Brigade.
L’AGREMENT TECHNIQUE DU RECRUTEMENT — LE COMPLEMENT D’EVALUATION MADE IN BSPP
Retrouvez cette particularité de recrutement à la BSPP sur notre autre article : https://allo18.fr/recrutement-lagrement-technique-une-evaluation-made-in-bspp/