Les rencontres d’ALLO DIX-HUIT — Le général Jean-Marie Gontier est devenu commandant de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris le 1er décembre dernier. Nous sommes donc allés à sa rencontre pour en savoir plus sur les directions qu’il souhaite donner à son temps de commandement. Il nous livre en exclusivité ses convictions sans ambages.
Qu’est-ce qui vous aura le plus marqué dans votre fonction de commandant en second de la Brigade depuis 2017 ? Quel bilan en faites-vous ?
Il n’y a, à mon sens, pas de bilan à dresser. La Brigade est en prise directe avec l’actualité. Il n’est pas vraiment utile de faire l’inventaire alors que l’activité est incessante. L’important, c’est de coller à la réalité qui est la nôtre. S’assurer que nos moyens sont en adéquation avec le contexte opérationnel dans lequel on agit et avec les attentes de nos concitoyens, mais également de nos autorités de tutelle. Là est l’essentiel. En revanche, commandant en second est une position très confortable. Vous n’êtes pas exposé comme premier chef au cœur de l’action, ni à la pression immédiate qu’elle soit ministérielle, préfectorale, politique ou interne. Cela permet de réfléchir dans la profondeur. Sur les sujets de fond, le C2 apporte des éléments de compréhension ou de réflexion au chef sous des angles nécessairement différents, avec un détachement qui peut lui être utile. J’ai pu ainsi mesurer la valeur et l’importance des combats menés par le général de division Jean-Claude Gallet. Ces deux dernières années ont été menées des batailles cruciales pour notre Brigade, notamment pour maintenir le niveau des effectifs. Le métier de sapeur-pompier s’exerce dans toute la France, aussi la fonction publique territoriale peut parfois séduire nos sapeurs-pompiers en favorisant la proximité familiale et l’attachement à sa région d’origine. Pour autant, faire ce choix signifie aussi un renoncement à cette part d’adrénaline qu’offrent la plaque parisienne et la manière de conduire la mission. Les travaux sur la sur-sollicitation dans le domaine du SUAP, sur les interventions évitables ou encore sur les logements, ont apporté des réponses adéquates qu’il faut maintenant inscrire dans la durée. Pour moi, ce sont les sujets les plus importants, tout comme convaincre les pouvoirs publics de consentir les efforts budgétaires nécessaires pour nous permettre à la fois de fidéliser notre personnel et de conserver notre niveau opérationnel.
Ces deux dernières années ont été marquées par le décès de quatre sapeurs-pompiers de Paris. Dans quelle mesure ces pertes dramatiques pourraient influencer votre commandement ?
Quand on choisit le métier des armes, évidemment, au bout de son engagement, de ses convictions, il peut y avoir la perte de sa vie pour quelque chose de supérieur à soi. C’est quelque chose qui nous habite. Lorsqu’on est confronté à la dure réalité, lorsque l’on perd un ou plusieurs de nos sapeurs-pompiers, c’est extrêmement dur à vivre. Ce sont des frères d’armes que nous perdons. Du sapeur qui arrive à Villeneuve-Saint-Georges au général, nous avons tous ce métier fermement ancré dans notre âme. On ne nous choisit pas « sur étagère » et on ne rejoint pas la BSPP dans les dernières années de notre parcours professionnel. Il n’est pas souhaitable d’être le général de la Brigade sans avoir décalé au fourgon, sans avoir été chef de garde, commandant d’unité et chef de corps. C’est d’ailleurs la même chose pour un chef de centre, s’il n’avait pas été sapeur, caporal, caporal-chef. Donc lorsque l’un de nous part dramatiquement, c’est terrible pour nous tous. En revanche, la cohésion du corps, le sens de la mission et les valeurs militaires de la BSPP font que l’on chemine, que l’on continue à avancer malgré ces pertes, ces drames… Et on ne peut qu’aller de l’avant, parce que le seul hommage que l’on puisse rendre à nos morts au feu, c’est de continuer la mission.
Et techniquement ?
Sur un plan plus pratique, bien évidemment, on essaye toujours de tirer un enseignement de ces disparitions, de ces causes de disparition et d’améliorer soit nos modes opératoires, soit notre matériel, soit notre façon de former. Mais pour les quatre derniers décès que nous avons eu, à aucun moment notre formation, nos moyens ne sont mis à défaut. C’est la véritable dangerosité du métier qui refait surface.
Que représente pour vous le fait de devenir général commandant la Brigade ?
C’est l’histoire d’une vie. Je suis le fils d’un sous-officier de la BSPP, qui a commencé sapeur et qui a terminé sa carrière adjudant-chef. Il a su me transmettre le virus et j’ai eu cette chance de voir la Brigade par une belle fenêtre et de la voir tellement évoluer sans jamais rien perdre de son éclat et de ses fondamentaux. Vous l’avez compris, la Brigade c’est quelque chose ! Alors arriver à ce poste, ce n’est pas un aboutissement parce que fort heureusement dans la vie il faut avoir plusieurs centres d’intérêt et plusieurs sources de stimulation. Mais c’est une fierté de faire ce métier, dans ces conditions, et un immense plaisir de le partager avec des femmes et des hommes qui comprennent, je pense, la façon dont je m’exprime ; des femmes et des hommes qui ont la Brigade chevillée au corps, comme je l’ai. Quand j’y suis entré, j’avais surtout en tête de monter dans le fourgon, de partir au feu, d’être au contact de mes concitoyens, d’être utile à la société de cette manière, d’exercer tout simplement mon rôle d’officier de l’armée de Terre. Commander un jour la Brigade n’était pas le sujet. Aujourd’hui, c’est un grand honneur d’être à la tête de ces hommes et ces femmes d’exception. Celles et ceux qui écrivent les pages de l’histoire de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris !
Comment percevez-vous la BSPP et comment est-elle, selon vous, perçue de l’extérieur ?
La BSPP est une unité reconnue, par essence, qui a l’estime de la population et un capital sympathie énorme. C’est une histoire de cœur et de courage. Elle soulage la détresse, elle accourt pour amoindrir la douleur, elle est au contact des plus fragiles. D’une certaine manière, elle sauve une part du monde tous les jours et je pense qu’il faut en être conscient. Il faut en être fier, sans fioriture et sans fausse modestie, mais en toute humilité, il faut être fier de ce que nous faisons. La Brigade a une vraie valeur, maintenant c’est à nous, collectivement, de faire en sorte de la conserver, de la renforcer. Parfois des écarts de comportement sont commis, très souvent relevant d’actes individuels et ces erreurs regrettables doivent nous rappeler que nous sommes un tout terriblement humain, avec ses forces et ses faiblesses. Le reflet de la société dans sa diversité, dans sa richesse et parfois dans sa part d’ombre.
Quelle est la qualité première du sapeur-pompier de Paris et comment peut-il exprimer au mieux son statut militaire ?
La qualité première du sapeur-pompier de Paris, c’est sa volonté de servir. Très clairement, on ne rejoint pas cette unité par hasard. C’est un choix personnel et professionnel. Mais le choix du statut militaire également, avec ses droits, qu’il ne faut pas mésestimer, et surtout ses devoirs et ses obligations. Et le premier des devoirs, c’est le sens de la mission, ce dévouement extrême, et cette générosité poussée à son paroxysme. Tout cela se résume en un art de vivre qui m’est très cher : le culte de la mission. J’ai ça à faire ? Je le fais. Je ne regarde pas d’abord ma fiche de poste en disant que je n’ai pas à le faire. Cela fait quand même une différence. Cet engagement a une valeur : il n’a pas de prix ni de coût. Et cette valeur, c’est la mise à disposition de sa jeunesse. Ses plus belles années données au profit de la population parisienne et de la Nation. Je rappelle que le sapeur-pompier de Paris est également engagé sur des théâtres extérieurs, c’est l’expression de son statut.
La BSPP répond-elle aux standards du XXIe siècle ?
La Brigade est un outil formidable, un modèle exceptionnel. Créée par Napoléon Bonaparte, la BSPP est forte de deux siècles d’histoire, accompagnant les transformations de l’époque du baron Haussmann aux enjeux de la nouvelle métropole du grand Paris, en traversant plusieurs conflits mondiaux. La Brigade est quelque chose d’extrêmement vivant et de tout à fait actuel. C’est pour cela qu’il faut sans cesse se remettre sur l’ouvrage, que ce soit une part de notre organisation, notre fonctionnement courant, ou encore notre prise en compte du futur et c’est normal, car c’est une grande « Maison », établie sur quatre départements. C’est unique en France. Mais c’est un modèle qui a toute sa pertinence et encore de l’avenir. Riche de son capital humain, renforcé par son statut, il possède encore une très forte capacité d’adaptation, d’innovation et une agilité remarquable pour une institution bicentenaire et forte de 8 500 femmes et hommes de conviction. Dans toutes ses dimensions, humaines, opérationnelles, techniques, intellectuelles, inventives, personnelles et collectives. La Brigade a assurément de l’avenir.
Quels sont les atouts de la Brigade pour faire face aux enjeux de demain ?
Déjà, sa communauté humaine. Ceux qui nous rejoignent sont prêts à donner sans compter pour faire progresser une belle cause. Cet enthousiasme est déjà un grand atout. Ensuite, vient la cohérence. Notre chaîne de commandement est solide, structurée et capable de valoriser toutes les initiatives. Et c’est la force de cette maison : valoriser les initiatives. La Brigade est une entreprise apprenante. Tout ce qu’elle voit, elle le valorise, elle le fait sienne et le retranscrit en doctrine, en réglementation opérationnelle, en règles de prévention ou encore en mode d’action. C’est comme ça que nous avons traversé deux siècles. Si l’atout avait été la technologie ou nos casernes, nos camions ou notre matériel, la Brigade aurait-elle été bicentenaire ? Non. Tout s’use, tout passe de mode, beaucoup de choses se jettent. L’atout, ce n’est pas les camions neufs, ce n’est pas les casernes, ce n’est pas toujours plus de moyens. C’est l’humain et le statut militaire mais également son appartenance à la préfecture de police qui permet à la Brigade d’être au cœur des réflexions portant sur les enjeux de la plaque parisienne.
Sur quels axes pouvons-nous encore améliorer notre organisation, notamment dans le domaine fonctionnel ?
Il faut nous moderniser. Et la modernisation dans le fonctionnement et l’organisation passe par la dématérialisation de beaucoup de processus, dans une toujours plus grande autonomie et responsabilisation de chaque niveau de responsabilité et de commandement. Pour ça, on a besoin de la force d’esprit et de la créativité de chacun. Tout ne peut pas venir du haut de la pyramide, c’est à l’épreuve des faits que l’on comprend que certains détails peuvent être améliorés. Il faut faire plus vite et plus simple dans certains domaines techniques ou administratifs. Nous avons encore beaucoup de tâches internes, de façons de fonctionner qui, parfois, n’apportent pas une plus-value exceptionnelle dans le quotidien.
Mettre en avant le formidable escalier social qu’offre la Brigade.
Quels vont être les enjeux de ces prochaines années pour la Brigade ?
L’enjeu immédiat de la Brigade est de pérenniser notre modèle. Nous sommes dans une société où les choses évoluent très vite et la tentation persiste à considérer certains modèles comme surannés, plutôt que d’estimer leurs capacités à se remodeler. Donc le premier enjeu, c’est de pérenniser le modèle Brigade et faire comprendre à nos sapeurs-pompiers les raisons de ces évolutions pour conduire ce changement dans les meilleures conditions. Ensuite, vis-à-vis de l’extérieur, les enjeux auxquels sont confrontés la Brigade sont les enjeux de notre société : la smart-city, les smart grid, le numérique, les modes de déplacement évolutifs, les nouveaux rapports sociaux et leur gestion (dont notamment l’explosion des agressions qui touche fortement nos sapeurs-pompiers de Paris), l’avenir du pré-hospitalier… C’est la ville “intelligente” et connectée. Demain, il faudra apporter des solutions de protection face aux nouveaux risques qui vont émerger, face aux attentes toujours plus nombreuses de nos concitoyens, des solutions de défense face aux nouvelles menaces, notamment la menace terroriste, protéiforme et persistante. Je ne peux pas faire une liste des enjeux de la Brigade, ils sont trop nombreux : ils sont technologiques, industriels, architecturaux, générationnels, humains… Les enjeux de la Brigade, c’est tout cet ensemble, c’est un « bloc » si vous me suivez ! Par ailleurs, nous avons des rendez-vous, et notamment les Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Les JO ne sont pas un enjeu mais un rendez-vous. Une fois les jeux passés, il reste le paysage urbain. Ça, c’est l’enjeu, le rendez-vous sera passé et il restera les constructions et leur réutilisation, leur seconde vie, l’héritage, c’est cela qui nous intéresse.
Des enjeux de recrutement aussi ?
Bien sûr. La Brigade doit continuer d’attirer la jeunesse de France et donner envie de la rejoindre car elle reste une opportunité exceptionnelle. Sapeur-pompier de Paris c’est plus qu’un métier, c’est un idéal. C’est aussi une des raisons pour lesquelles les jeunes peuvent nous quitter, car un idéal ne dure pas nécessairement 20 ou 30 ans mais parfois juste quelques années, pour les nouvelles générations. Avec le temps, vous pouvez passer à autre chose. C’est pour cela qu’il faut avoir une notion raisonnable de fidélisation et surtout mettre en avant le formidable escalier social qu’offre l’armée de Terre en général et la Brigade en particulier. Chaque sapeur qui s’engage peut légitimement ambitionner d’assumer une fonction de responsabilité dans le domaine opérationnel ou technique, en accédant au corps des sous-officiers ou des officiers. C’est assez rare dans une grande organisation pour le souligner. Ce n’est pas qu’une condition de diplôme, c’est avant tout une question de volonté. Il y a aussi un objectif impératif, qui est celui de permettre à un nombre toujours plus important de jeunes femmes de rejoindre nos rangs et de promouvoir le leadership féminin. La pratique du métier est complexe et cette complexité offre une parité des chances au genre. Les jeunes femmes servant à la Brigade sont exceptionnelles de courage et de volonté, et établissent un équilibre propice à la prise de responsabilité et à la performance. Le leadership féminin est une réalité avérée et la Brigade en a besoin.
Quelles seront vos priorités ?
Il y en a trois. La première, c’est réaffirmer, redonner à l’ensemble de nos personnels les notions de prise de responsabilité, de déconcentration hiérarchique, de compréhension, d’esprit d’initiative et d’intelligence de situation. On ne peut pas toujours tout commander par le haut, il faut que chacun assume, à son niveau, ses responsabilités. Mais avec la juste compréhension des enjeux globaux. Chaque échelon de responsabilité apporte beaucoup dans la cohérence de l’unité, du sapeur de première classe ou du caporal au chef d’agrès, du chef de centre au commandant d’unité. C’est normal, tout cela s’emboîte, et fait la structuration de la BSPP. La deuxième réside dans la performance collective qui passe par la gestion des opérations et l’entrainement permanent, mais également par la qualité des relations humaines. Cette fibre humaine qui anime la BSPP est de grande qualité. C’est important de donner des perspectives à chacun, et d’être à leur écoute. Cela passe par trois mots simples : compétence, rigueur, humanité. La compétence dans l’action, la rigueur individuelle et collective, et l’humanité dans ce que la Brigade offre à vivre à ses sapeurs-pompiers : l’exceptionnel dramatique, le geste de générosité au quotidien. La troisième orientation, c’est que tout est possible. On ne peut pas garantir un parcours professionnel sécurisé car la majorité de nos personnels sont sous contrat, mais nous garantissons, à celui qui s’en donne les moyens, d’assumer des responsabilités, de pouvoir aller à l’avancement et de faire partie de la chaîne de commandement. Nous devons y attacher toute notre attention. On n’embauche pas un caporal, un chef de centre ou un officier sur concours : on le produit. On le forme ! On l’accompagne à tous les niveaux. La Brigade ne peut pas se passer de son escalier social, et cela doit être poursuivi et consolidé autant que possible. Nous sommes producteurs de perspectives et de valeurs.
Certains points vous inquiètent-ils en termes de fidélisation, notamment l’attrait que peuvent avoir les SDIS ?
Bien sûr. Nous mettons beaucoup d’énergie, de cœur et de moyens pour former notre personnel, l’entrainer au quotidien et édifier notre chaîne de commandement. C’est donc toujours un crève-cœur que de voir partir trop tôt certains de nos militaires du rang, de nos cadres sur lesquels nous avions investi. Cette inquiétude est similaire pour n’importe quel chef d’entreprise qui voit partir sa main d’œuvre qualifiée. Je respecte le choix des uns et des autres mais il est vrai que cela ajoute de la difficulté. À chacune des structures ses atouts, ils ne sont pas les mêmes, il n’y a pas d’ambiguïté. Mais en définitive, c’est aussi une « propagation » de nos valeurs, c’est plutôt positif !
Et je tiens à rappeler que la Brigade accompagne ce retour vers la vie civile à travers les différents dispositifs d’aides animés par l’agence de reconversion de la défense et le service de reconversion interne. D’ailleurs, les projets de reconversion ne concernent pas exclusivement la fonction publique, loin de là. Cet accompagnement est un véritable atout de notre statut, cela traduit cette considération que nous devons à chacun(e) d’entre nous !
Quelle est, selon vous, la ligne de conduite à adopter dans le domaine de la solidarité entre sapeurs-pompiers de Paris ?
Cela commence par la vie de caserne. On partage quelque chose de fort pendant les gardes donc, à partir de là, il faut se considérer comme frères d’armes. Le terme est bien choisi. Les uns doivent prendre soin des autres. Pour moi, la solidarité s’exprime déjà au sein de l’unité de base : le centre de secours. Il faut avoir une attention réelle les uns envers les autres. Après, nous avons aussi un réseau d’aidants, de leviers dans l’action sociale, qui pourra aider le sapeur-pompier au besoin. Ensuite, sur le plan opérationnel, le binôme est le symbole du soutien mutuel, notre vie dépend de l’autre et inversement. La solidarité passe aussi par le respect de soi et de l’autre. Il faut avoir de l’estime pour ce que l’on fait et respecter notre camarade, parce que c’est tout simplement le prolongement de soi ! Il fait le même métier, dans les mêmes conditions, avec les mêmes contraintes et la même conviction. Pour moi, la solidarité c’est tout par conviction et rien par obligation.
Quelle importance accordez-vous à l’action sociale ?
C’est un levier du bien vivre son engagement et ensemble. Quand on est fort de 8 500 personnes, il y a immanquablement des coups du sort et des aléas de la vie. Cela rassure de savoir qu’il existe de réels dispositifs, faciles à rejoindre avec de vrais résultats. Cela ne résoudra pas tous les problèmes mais c’est déjà un premier appui que l’on donne à quelqu’un qui commence à boiter. C’est aussi porter le sac à dos de son camarade, pour un temps, pour qu’il puisse le reprendre ensuite. C’est ça, la solidarité. Le but de l’action sociale n’est pas de favoriser l’enkystement mais de façonner de l’espérance. Notre effort consiste à éviter que nos personnels ne sombrent dans une situation difficile mais puissent retrouver rapidement le chemin d’une vie normale.
Pour moi la solidarité, c’est tout par conviction et rien par obligation.
Quelle doit-être la place des anciens dans notre dispositif ?
Nous devons garder le lien avec nos anciens car ils sont la continuité de notre esprit de corps. Quand on nous quitte, c’est rassurant et convivial de savoir qu’il y a une association pour nous accueillir dans notre région d’origine ou pour nous aider dans une reconversion. Les anciens sont également importants en termes de recrutement, car ils portent haut les valeurs de la Brigade et peuvent donner envie à des jeunes de leur entourage de nous rejoindre. Cette continuité a du sens. Nos aînés sont une grande part de notre histoire et nous sommes leurs héritiers. C’est important d’avoir un échange, un lien, une relation avec eux. Aujourd’hui la Brigade est une et indivisible, et il n’y a qu’un statut à la Brigade : celui de sapeur-pompier militaire de Paris, qu’il serve en unité d’incendie, d’appui ou de formation, en état-major, dans un bureau ou dans un atelier. Quand le sapeur-pompier de Paris quitte la Brigade et qu’il rejoint le rang des anciens, il continue d’appartenir d’une certaine façon à une même communauté à travers la fédération nationale des anciens sapeurs-pompiers de Paris.
Y a‑t-il des personnes qui vous ont davantage inspiré à la Brigade ?
J’ai été impressionné par les sous-officiers qui m’ont formé, par leur connaissance du métier et leur passion. Leur volonté de transmettre. Ils m’ont donné envie de rester. Après, au cours de mon parcours, j’ai eu la chance de rencontrer des officiers qui m’ont commandé et qui ont su me mettre sur la voie, en disant “il ne faut pas en rester là mais il faut aller vers ça”. Ils se reconnaitront. D’autres ont su accompagner mes initiatives et ont été bienveillants. Tout au long de mon parcours, que ce soit à la Brigade ou lorsque j’ai exercé d’autres fonctions au sein de l’armée de Terre et des armées, j’ai toujours rencontré des personnes qui avaient ce feu sacré. Les grands chefs militaires sont également inspirants, que ce soit les vainqueurs de 14 – 18 ou ceux qui ont réinvesti la France au cours de la seconde guerre mondiale, ou bien encore ceux qui ont combattu pour la liberté sur de nombreux continents… De grandes figures m’ont inspiré, bien évidemment. Il est d’ailleurs très intéressant de découvrir dans les biographies de nos grands chefs militaires, leur profonde humanité, leur grande culture et leur volonté féroce. Ils ont toujours été attentifs envers le groupe, sans fausse démagogie, et pionniers d’une certaine façon.
Avez-vous une maxime qui conduirait votre action ?
Quand on cite trop souvent, c’est que l’on n’a pas ses propres mots. Alors je ne vous dirai qu’une chose : ce qui m’anime depuis le début, c’est que je ne fais rien par obligation, tout par conviction. Je crois que beaucoup d’entre nous se retrouveront dans cette façon de penser. Mais j’aime aussi beaucoup Churchill qui disait “l’attitude est une petite chose qui fait une grande différence”.
Curriculum Vitae
BIOGRAPHIE DU GÉNÉRAL JEAN-MARIE GONTIER
Commandant la brigade de sapeurs-pompiers de Paris
Né le 13 juillet 1965 à Montreuil, le général Jean-Marie Gontier commande la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, depuis le 30 novembre 2019. Après une scolarité à l’École militaire préparatoire d’Autun, il suit des études supérieures à l’université du Panthéon-Sorbonne (1983/1988), où il obtient un DEA d’économie publique et un DESS de sciences-politiques, tout en étant rédacteur/crédits entreprises dans une grande banque parisienne.
Il choisit, en 1988, la brigade de sapeurs-pompiers de Paris à l’issue de la formation initiale d’officier de réserve, où il sert au 1er groupement d’incendie et de secours (24e Cie). Activé officier sur titre, il suit la division d’application de l’École supérieure et d’application du Génie. A l’issue, il rejoint en 1991, la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, à la 28e, 27e puis à la 6e compagnie. Il y occupe les fonctions de chef de garde incendie, adjoint au commandant de compagnie puis commandant d’unité.
En 1998, il est muté comme chef de bureau, à la direction du Génie de Limoges. Breveté de l’École de Guerre en 2001 (8e promotion du Collège Interarmées de Défense), il obtient également un DEA de polémologie et d’histoire comparée à la Sorbonne (Paris IV).
De 2001 à 2004, il sert au secrétariat général pour l’administration, en tant que chef de bureau du contrôle de gestion à la direction du service national et est détaché auprès de la mission ministérielle d’aide au pilotage. En 2002, Il sera engagé en opération extérieure dans un cadre multinational en Sierra-Léone (opération Silkman sous mandat Britannique).
Il rejoint de nouveau la brigade de sapeurs-pompiers de Paris et occupe de 2004 à 2008, le poste de chef de bureau de la programmation financière et du budget. Il est un interlocuteur privilégié des autorités budgétaires, de la ville de Paris, de la préfecture de Police, de la direction de la sécurité civile et du ministère de l’Intérieur. Pendant cette période, il a été auditeur de la 5e promotion du cycle des hautes études pour le développement économique, dirigé par le ministère de l’économie et des finances.
En 2008, il est affecté au 1er groupement d’incendie, qu’il commande de 2009 à 2011. Il est élu dans le même temps à la présidence de la mutuelle des sapeurs-pompiers de Paris, poste qu’il assurera jusqu’à l’été 2019.
En 2011, il prend les fonctions de directeur de la formation et chef de corps de l’École Polytechnique. En tant que membre du comité exécutif, il participe à l’évolution des modes de gestion de l’École et des parcours académiques des élèves ingénieurs et l’ouverture à l’international.
En 2015, il intègre pour la 4e fois la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, comme chef d’état-major puis commandant en second. Auditeur de la 26e session nationale de l’Institut national des hautes études de sécurité et justice, il suit en même temps un executive master à la Harvard Kennedy School (leadership in crisis). Consolidant son expertise dans la gestion de crise, il a également suivi plusieurs stages opérationnels, au sein du mécanisme européen de sécurité civile, au Home Front Command Israélien et au Collège de Défense de l’Otan.
Il est promu général de Brigade le 1e août 2018. Le général Gontier est officier de la légion d’honneur, titulaire de la médaille de vermeil pour acte de courage et de dévouement, de la médaille d’or de la sécurité intérieure de la « operational service medal for Sierra Leone » du gouvernement britannique et d’une citation portant attribution de la médaille de la défense nationale échelon or avec étoile de vermeil.
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