#BrigadeInside — Pour aider les sapeurs-pompiers de Paris à améliorer leur alimentation, le lieutenant-colonel Anne Menguy-Fleuriot nous donne ses explications et ses conseils avisés. À table !
Médecin-chef de l’antenne médicale de Villeneuve-Saint-Georges (94), elle est affectée au groupement formation instruction et de secours (GFIS) depuis juin 2007. Le lieutenant-colonel Anne Menguy-Fleuriot est médecin d’unité et s’occupe donc du suivi des sapeurs-pompiers. Aussi médecin généraliste et surtout médecin du sport, elle a reçu une formation dans le domaine de la nutrition.
Pour un adulte, combien de calories par jour sont-elles recommandées ?
Pour assurer le bon fonctionnement de notre organisme, nous devons combler plusieurs besoins.
Le premier est le besoin hydrique : il faut boire au moins 2L d’eau par jour (hors compensation d’une activité physique) ! Pour évaluer son hydratation, il existe un moyen simple : vérifier la couleur de ses urines du matin, elles doivent être d’un jaune très pâle, si elles sont foncées, c’est que l’hydratation de la veille a été insuffisante.
Puis, les besoins caloriques de base (hors activité physique ou professionnelle) : une femme doit consommer quotidiennement environ 2 200 calories et un homme environ 2 700 calories. Les apports proviennent de trois nutriments : les glucides, les lipides et les protéines. Ils doivent idéalement se répartir selon les proportions suivantes : les protéines doivent représenter de 11 à 15 % des apports, les glucides de 45 à 54 % et les lipides de 35 à 40 %.
Enfin, l’alimentation doit apporter des micronutriments : des vitamines, des sels minéraux et des fibres.
Lorsque nous mangeons trop peu, nos apports caloriques sont insuffisants, ce qui entraîne des carences, une perte de poids et un manque d’énergie. Par conséquent, notre organisme fonctionne moins bien.
Quelle répartition pour les repas ?
Notre alimentation doit être répartie sur plusieurs repas au cours de la journée : petit-déjeuner, déjeuner et dîner (et éventuellement des collations) ; en sachant que chacun de ces repas a une composition bien spécifique (en quantité et qualité).
Le petit-déjeuner est le repas le plus important de la journée, il doit apporter un quart des apports énergétiques journaliers, ce qui n’est pas négligeable. Un petit-déjeuner consistant et équilibré permet d’apporter l’énergie nécessaire pour bien démarrer la journée. En plus, il est essentiel pour maintenir notre poids de forme et réguler l’appétit tout au long de la journée (et éviter les grignotages de fin de journée et de soirée !).
Et les sportifs alors ?
Lors d’une activité sportive, le corps est soumis à des besoins spécifiques (qualitatifs et quantitatifs) qu’il faut adapter à sa pratique (loisir/compétition).
Les dépenses corporelles sont principalement hydriques et énergétiques. Les besoins énergétiques varient selon le sport pratiqué, sa durée et son intensité. Un sportif d’endurance aura besoin d’apporter plus de glucides dans son alimentation pour disposer d’une réserve d’énergie. Tandis qu’un sportif de force devra augmenter ses apports protéiques pour nourrir et réparer ses muscles. Il est donc important, pour un sportif régulier, d’adapter son alimentation en fonction de son activité sportive.
Quant aux dépenses hydriques, elles sont dues à la production de chaleur générée par l’exercice physique. En effet, le corps dissipe le surplus de chaleur notamment par la transpiration afin d’éviter la surchauffe corporelle. La sudation peut atteindre une quantité d’eau importante : de 0,5 à 2 litres par heure en fonction de l’intensité de l’exercice et de la température ambiante, et parfois même jusqu’à 3 ou 4 litres dans les conditions les plus extrêmes.
Il est donc indispensable de compenser cette perte hydrique :
- pour les efforts supérieurs à 1h en extérieur ou pour les activités pratiquées en salle (quelle que soit leur durée), l’hydratation se fait au cours de la pratique sportive (dès le début !) et est poursuivie après ;
- pour les efforts inférieurs à 1h en extérieur : la compensation peut être réalisée après l’exercice.
Comment bien se nourrir pour réparer ses muscles ?
Dans le cadre des sports de force, pour assurer une récupération rapide et optimale des muscles, il est conseillé de consommer des protéines juste après la séance (dans les 30 minutes). Des aliments naturels sont à privilégier, comme les produits laitiers (fromage blanc, yaourts), des fruits (fruits secs, fruits frais), des amandes, noix, etc. À défaut, des compléments protéinés peuvent être utiles (en vérifiant la présence des normes antidopage sur les emballages !).
Quid du pompier en service de garde… ?
Lors de ses jours de gardes, il est difficile pour le sapeur-pompier d’avoir une alimentation régulière. Lorsqu’il décale toute la journée, il ne peut pas manger à des horaires réguliers, en quantité suffisante ou avoir des apports équilibrés. L’hydratation, qui a un impact direct sur les capacités cognitives (la mémoire et la concentration), est elle aussi souvent insuffisante. Une bonne hydratation est de l’ordre 2 L d’eau par jour, auxquels on ajoute environ 500 ml d’eau pour chaque heure de manœuvre (à moduler en fonction des conditions climatiques).
Comment se nourrir convenablement en service de garde ?
En service de garde, lorsqu’il décale beaucoup, le pompier va simplifier ses repas par manque de temps et va souvent attendre d’avoir très faim pour s’alimenter. Or, lorsqu’on a très faim, notre taux de sucre sanguin (glycémie) est au plus bas et nos choix alimentaires se portent vers des aliments composés de sucres rapides (sucreries, pain blanc, boissons sucrées, etc.). S’ils permettent de faire remonter efficacement la glycémie, ils ne sont pas pour autant bons pour notre santé (ils ne reconstituent pas nos réserves de glucides musculaires). Il faut privilégier les sources de glucides lents (céréales complètes, légumineuses) aux glucides rapides pour reconstituer nos stocks énergétiques.
Si la prise d’un repas complet est difficile par manque de temps, on peut proposer une collation composée de fruit frais (banane, pomme, raisin, etc.), de fromage blanc avec du muesli, d’une poignée de fruits à coque (noix, amandes, etc.) ou de fruits secs et bien sûr, de l’eau.
Et en ce qui concerne les interventions sur VSAV ou feu ?
Pour un pompier au VSAV qui décale beaucoup et rentre pour peu de temps au centre de secours, on peut lui conseiller de garder à portée de main une bouteille d’eau, un fruit frais et/ou un sachet de fruits secs et à coque : c’est idéal en cas de fringale entre deux interventions.
Quant aux interventions pour feu, la dépense énergétique et la déshydratation sont majeures. La prise d’une collation de récupération est indispensable : des barres de protéines ou céréalières idéalement pauvres en sucres rapides (faciles à transporter et à conserver) et des fruits (frais, fruits à coque, fruits secs), associés à une bonne hydratation permettent une bonne récupération. On peut aussi proposer des collations salées : un sandwich jambon-fromage par exemple !
Doit-on utiliser des compléments alimentaires ?
Les compléments alimentaires sont constitués d’un groupe hétérogène de produits : compléments protéinés, vitamines, minéraux (magnésium par exemple), plantes, etc.
Ils permettent de compléter les apports lorsque l’alimentation n’est pas suffisamment variée et/ou équilibrée. Dans le cas contraire, il est inutile de prendre des compléments alimentaires pour être en bonne santé.
Les compléments protéinés sont utiles en collation juste après une séance de sport (de type musculation, poids de corps, cross-training, cordes, etc.). À noter que la collation post-effort n’est utile que si le prochain repas est pris plus d’une heure après l’entraînement. Ils peuvent être intéressants si l’accès à des sources naturelles de protéines est rendu difficile (chez le pompier de garde par exemple). Lors de l’achat, il faut toujours s’assurer de la présence de normes antidopage sur l’étiquette (voir ci-contre), afin d’être sûr qu’il n’y ait pas de produits dangereux à l’intérieur. Nous déconseillons d’acheter les produits sur lesquels aucune norme antidopage ne figure.
En cas de doute ou dans des cas particuliers (sport intense par exemple), il ne faut pas hésiter à demander conseil à son médecin.
Où commence le dopage ?
Le dopage commence lorsqu’on consomme des substances dans le but d’améliorer ses performances (force, vitesse, concentration, lutte contre la fatigue, etc.). Ces produits ont toujours un impact défavorable sur la santé.
La prise de tels produits à la BSPP fait courir un risque au pompier qui les consomme (risque cardio-vasculaire entre autres), mais aussi à ses collègues et aux victimes qu’il pourrait mettre en danger sur intervention (s’il fait un malaise sur feu ou lors d’un secours à personne par exemple).
Photo CCH Sylvia Borel