SANTÉ — Pompier bien nourri… jamais surpris !

 — Modi­fiée le 25 juillet 2024 à 08 h 49 

#BrigadeInside — Pour aider les sapeurs-pompiers de Paris à améliorer leur alimentation, le lieutenant-colonel Anne Menguy-Fleuriot nous donne ses explications et ses conseils avisés. À table !

Méde­cin-chef de l’antenne médi­cale de Vil­le­neuve-Saint-Georges (94), elle est affec­tée au grou­pe­ment for­ma­tion ins­truc­tion et de secours (GFIS) depuis juin 2007. Le lieu­te­nant-colo­nel Anne Men­guy-Fleu­riot est méde­cin d’unité et s’occupe donc du sui­vi des sapeurs-pom­piers. Aus­si méde­cin géné­ra­liste et sur­tout méde­cin du sport, elle a reçu une for­ma­tion dans le domaine de la nutrition.

Pour un adulte, com­bien de calo­ries par jour sont-elles recom­man­dées ?
Pour assu­rer le bon fonc­tion­ne­ment de notre orga­nisme, nous devons com­bler plu­sieurs besoins.
Le pre­mier est le besoin hydrique : il faut boire au moins 2L d’eau par jour (hors com­pen­sa­tion d’une acti­vi­té phy­sique) ! Pour éva­luer son hydra­ta­tion, il existe un moyen simple : véri­fier la cou­leur de ses urines du matin, elles doivent être d’un jaune très pâle, si elles sont fon­cées, c’est que l’hydratation de la veille a été insuffisante.

Puis, les besoins calo­riques de base (hors acti­vi­té phy­sique ou pro­fes­sion­nelle) : une femme doit consom­mer quo­ti­dien­ne­ment envi­ron 2 200 calo­ries et un homme envi­ron 2 700 calo­ries. Les apports pro­viennent de trois nutri­ments : les glu­cides, les lipides et les pro­téines. Ils doivent idéa­le­ment se répar­tir selon les pro­por­tions sui­vantes : les pro­téines doivent repré­sen­ter de 11 à 15 % des apports, les glu­cides de 45 à 54 % et les lipides de 35 à 40 %.
Enfin, l’alimentation doit appor­ter des micro­nu­tri­ments : des vita­mines, des sels miné­raux et des fibres.

Lorsque nous man­geons trop peu, nos apports calo­riques sont insuf­fi­sants, ce qui entraîne des carences, une perte de poids et un manque d’énergie. Par consé­quent, notre orga­nisme fonc­tionne moins bien.

Quelle répar­ti­tion pour les repas ?
Notre ali­men­ta­tion doit être répar­tie sur plu­sieurs repas au cours de la jour­née : petit-déjeu­ner, déjeu­ner et dîner (et éven­tuel­le­ment des col­la­tions) ; en sachant que cha­cun de ces repas a une com­po­si­tion bien spé­ci­fique (en quan­ti­té et qualité).

Le petit-déjeu­ner est le repas le plus impor­tant de la jour­née, il doit appor­ter un quart des apports éner­gé­tiques jour­na­liers, ce qui n’est pas négli­geable. Un petit-déjeu­ner consis­tant et équi­li­bré per­met d’apporter l’énergie néces­saire pour bien démar­rer la jour­née. En plus, il est essen­tiel pour main­te­nir notre poids de forme et régu­ler l’appétit tout au long de la jour­née (et évi­ter les gri­gno­tages de fin de jour­née et de soirée !).

Et les spor­tifs alors ?
Lors d’une acti­vi­té spor­tive, le corps est sou­mis à des besoins spé­ci­fiques (qua­li­ta­tifs et quan­ti­ta­tifs) qu’il faut adap­ter à sa pra­tique (loisir/​compétition).

Les dépenses cor­po­relles sont prin­ci­pa­le­ment hydriques et éner­gé­tiques. Les besoins éner­gé­tiques varient selon le sport pra­ti­qué, sa durée et son inten­si­té. Un spor­tif d’endurance aura besoin d’apporter plus de glu­cides dans son ali­men­ta­tion pour dis­po­ser d’une réserve d’énergie. Tan­dis qu’un spor­tif de force devra aug­men­ter ses apports pro­téiques pour nour­rir et répa­rer ses muscles. Il est donc impor­tant, pour un spor­tif régu­lier, d’adapter son ali­men­ta­tion en fonc­tion de son acti­vi­té sportive.

Quant aux dépenses hydriques, elles sont dues à la pro­duc­tion de cha­leur géné­rée par l’exercice phy­sique. En effet, le corps dis­sipe le sur­plus de cha­leur notam­ment par la trans­pi­ra­tion afin d’éviter la sur­chauffe cor­po­relle. La suda­tion peut atteindre une quan­ti­té d’eau impor­tante : de 0,5 à 2 litres par heure en fonc­tion de l’intensité de l’exercice et de la tem­pé­ra­ture ambiante, et par­fois même jusqu’à 3 ou 4 litres dans les condi­tions les plus extrêmes.

Il est donc indis­pen­sable de com­pen­ser cette perte hydrique :

  • pour les efforts supé­rieurs à 1h en exté­rieur ou pour les acti­vi­tés pra­ti­quées en salle (quelle que soit leur durée), l’hydratation se fait au cours de la pra­tique spor­tive (dès le début !) et est pour­sui­vie après ;
  • pour les efforts infé­rieurs à 1h en exté­rieur : la com­pen­sa­tion peut être réa­li­sée après l’exercice.

Com­ment bien se nour­rir pour répa­rer ses muscles ?
Dans le cadre des sports de force, pour assu­rer une récu­pé­ra­tion rapide et opti­male des muscles, il est conseillé de consom­mer des pro­téines juste après la séance (dans les 30 minutes). Des ali­ments natu­rels sont à pri­vi­lé­gier, comme les pro­duits lai­tiers (fro­mage blanc, yaourts), des fruits (fruits secs, fruits frais), des amandes, noix, etc. À défaut, des com­plé­ments pro­téi­nés peuvent être utiles (en véri­fiant la pré­sence des normes anti­do­page sur les emballages !).

“L’alimentation joue sur nos neu­ro­trans­met­teurs et notre cerveau”

Méde­cin-chef Anne Menguy-Fleuriot

Quid du pom­pier en ser­vice de garde… ?
Lors de ses jours de gardes, il est dif­fi­cile pour le sapeur-pom­pier d’avoir une ali­men­ta­tion régu­lière. Lorsqu’il décale toute la jour­née, il ne peut pas man­ger à des horaires régu­liers, en quan­ti­té suf­fi­sante ou avoir des apports équi­li­brés. L’hydratation, qui a un impact direct sur les capa­ci­tés cog­ni­tives (la mémoire et la concen­tra­tion), est elle aus­si sou­vent insuf­fi­sante. Une bonne hydra­ta­tion est de l’ordre 2 L d’eau par jour, aux­quels on ajoute envi­ron 500 ml d’eau pour chaque heure de manœuvre (à modu­ler en fonc­tion des condi­tions cli­ma­tiques).
Com­ment se nour­rir conve­na­ble­ment en ser­vice de garde ?
En ser­vice de garde, lorsqu’il décale beau­coup, le pom­pier va sim­pli­fier ses repas par manque de temps et va sou­vent attendre d’avoir très faim pour s’alimenter. Or, lorsqu’on a très faim, notre taux de sucre san­guin (gly­cé­mie) est au plus bas et nos choix ali­men­taires se portent vers des ali­ments com­po­sés de sucres rapides (sucre­ries, pain blanc, bois­sons sucrées, etc.). S’ils per­mettent de faire remon­ter effi­ca­ce­ment la gly­cé­mie, ils ne sont pas pour autant bons pour notre san­té (ils ne recons­ti­tuent pas nos réserves de glu­cides mus­cu­laires). Il faut pri­vi­lé­gier les sources de glu­cides lents (céréales com­plètes, légu­mi­neuses) aux glu­cides rapides pour recons­ti­tuer nos stocks énergétiques.

Si la prise d’un repas com­plet est dif­fi­cile par manque de temps, on peut pro­po­ser une col­la­tion com­po­sée de fruit frais (banane, pomme, rai­sin, etc.), de fro­mage blanc avec du mues­li, d’une poi­gnée de fruits à coque (noix, amandes, etc.) ou de fruits secs et bien sûr, de l’eau.
Et en ce qui concerne les inter­ven­tions sur VSAV ou feu ?
Pour un pom­pier au VSAV qui décale beau­coup et rentre pour peu de temps au centre de secours, on peut lui conseiller de gar­der à por­tée de main une bou­teille d’eau, un fruit frais et/​ou un sachet de fruits secs et à coque : c’est idéal en cas de frin­gale entre deux interventions.

Quant aux inter­ven­tions pour feu, la dépense éner­gé­tique et la déshy­dra­ta­tion sont majeures. La prise d’une col­la­tion de récu­pé­ra­tion est indis­pen­sable : des barres de pro­téines ou céréa­lières idéa­le­ment pauvres en sucres rapides (faciles à trans­por­ter et à conser­ver) et des fruits (frais, fruits à coque, fruits secs), asso­ciés à une bonne hydra­ta­tion per­mettent une bonne récu­pé­ra­tion. On peut aus­si pro­po­ser des col­la­tions salées : un sand­wich jam­bon-fro­mage par exemple !

Doit-on uti­li­ser des com­plé­ments ali­men­taires ?
Les com­plé­ments ali­men­taires sont consti­tués d’un groupe hété­ro­gène de pro­duits : com­plé­ments pro­téi­nés, vita­mines, miné­raux (magné­sium par exemple), plantes, etc.

Ils per­mettent de com­plé­ter les apports lorsque l’alimentation n’est pas suf­fi­sam­ment variée et/​ou équi­li­brée. Dans le cas contraire, il est inutile de prendre des com­plé­ments ali­men­taires pour être en bonne santé.

Les com­plé­ments pro­téi­nés sont utiles en col­la­tion juste après une séance de sport (de type mus­cu­la­tion, poids de corps, cross-trai­ning, cordes, etc.). À noter que la col­la­tion post-effort n’est utile que si le pro­chain repas est pris plus d’une heure après l’en­traî­ne­ment. Ils peuvent être inté­res­sants si l’accès à des sources natu­relles de pro­téines est ren­du dif­fi­cile (chez le pom­pier de garde par exemple). Lors de l’achat, il faut tou­jours s’assurer de la pré­sence de normes anti­do­page sur l’étiquette (voir ci-contre), afin d’être sûr qu’il n’y ait pas de pro­duits dan­ge­reux à l’intérieur. Nous décon­seillons d’acheter les pro­duits sur les­quels aucune norme anti­do­page ne figure.

En cas de doute ou dans des cas par­ti­cu­liers (sport intense par exemple), il ne faut pas hési­ter à deman­der conseil à son médecin.

Où com­mence le dopage ?
Le dopage com­mence lorsqu’on consomme des sub­stances dans le but d’améliorer ses per­for­mances (force, vitesse, concen­tra­tion, lutte contre la fatigue, etc.). Ces pro­duits ont tou­jours un impact défa­vo­rable sur la santé.

La prise de tels pro­duits à la BSPP fait cou­rir un risque au pom­pier qui les consomme (risque car­dio-vas­cu­laire entre autres), mais aus­si à ses col­lègues et aux vic­times qu’il pour­rait mettre en dan­ger sur inter­ven­tion (s’il fait un malaise sur feu ou lors d’un secours à per­sonne par exemple).

Pho­to CCH Syl­via Borel


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