Contenu additionnel — Au regard d’une situation tendue dans la capitale de l’archipel, la BSPP est venue renforcer un détachement de sécurité civile. Voici le complément de l’article paru dans ALLO18 n°790 de novembre.
Interview du LCL Benoit De Joux
Le lieutenant-colonel de Joux a commandé le détachement dès son arrivée en Nouvelle-Calédonie. Il nous raconte ce qu’il a dû mettre en place.
Dr Breysse : “La mission était assez complexe d’un point de vue médical”
Le docteur a fait également partie du détachement. Il nous raconte dans quelles conditions il a du travailler avec son infirmier.
Le docteur Guillaume Breysse, médecin-chef désormais, mais médecin principal au moment de la mission, a 38 ans. Militaire depuis ses 18 ans, son parcours a débuté au sein de l’école de service santé des armées. Il possède un diplôme d’État de médecine générale et une capacité de médecine d’urgence. Affecté en 2015 à l’antenne médicale du 2ᵉ régiment d’infanterie de marine, il fait quatre départs, dont trois, au Mali, notamment lors des opérations Barkhane. Arrivé à la BSPP il y a trois ans à Ménilmontant où ses activités le conduisent sur ambulance de réanimation ou à la coordination médicale. Avec la BSPP, il est parti en Turquie sur le séisme, puis une semaine au Liban, et en fin, en Nouvelle-Calédonie.
En arrivant sur place, quelle était la mission initiale ?
Pour la mission, j’avais été désigné le soir à 21 heures et nous sommes partis de Champerret le lendemain à 7 heures. L’objectif du détachement, qui était finalement un mélange de BSPP, BMPM et SDIS, sous le commandement de la BSPP, était de renforcer la capacité incendie sur la ville de Nouméa, des casernes locales. Pour cela, trois médecins et trois infirmiers avaient été greffés au détachement dont j’allais être le médecin-chef. La mission numéro 1 pour nous, était le soutien de la force de renfort incendie sur le terrain, le rôle du médecin-chef s’inscrivait également dans le binôme COS avec le chef de détachement qui était le lieutenant-colonel de Joux. Nous sommes partis avec peu d’informations. Nous savions qu’il y avait beaucoup de dégâts, mais nous n’en savions pas beaucoup plus que ce qui était dans la presse. Pour l’équipe médicale, notre rôle allait être le soutien sanitaire opérationnel (SSO), donc nous sommes partis avec un médecin et un infirmier BSPP et nous avions emmené l’équivalent du matériel présent dans une AR, pour être en mesure de prendre en charge deux urgences absolues, intubés et ventilés.
Y avait-il eu des défis logistiques à relever ?
En effet, la mission était assez complexe d’un point de vue médical et se scindait en plusieurs phases. Quand nous sommes arrivés, l’hôpital de Nouméa n’était pas accessible, car des barrages sur l’ensemble de la ville en bloquaient l’accès et les voies terrestres de communication n’étaient pas permises les 10 – 15 premiers jours. Les seules évacuations possibles se faisaient par voie aérienne avec un hélicoptère du SAMU, ou par l’armée pour les états critiques. Nous sommes donc arrivés dans ce contexte, et nous nous sommes installés dans le poste médical avancé de la sécurité civile locale, qui, à ce stade, était dépourvu de matériel. Nous avons été alors les premiers à arriver avec du matériel de réanimation préhospitalière et nous avons armé un véhicule prêté par la sécurité civile locale. L’idée numéro 1 était de porter secours à un éventuel pompier blessé, mais nous avons rapidement élargi ce soutien aux forces de l’ordre, essentiellement à la police nationale présente sur ce secteur. L’un des médecins du détachement, issu du SDIS 13, a été détaché pour toute la mission au profit du RAID. Dans cette première phase, nous avons renforcé le PMA sur les urgences vitales où nous avons pris en charge, deux ACR, un coup de couteau et un OAP, entre autres. Lors de la deuxième phase, l’hôpital était de nouveau accessible et les voies terrestres libérées. Nous avons donc réarticulé le dispositif et axé le soutien sur un nouveau secteur, plus sensible au nord de Nouméa. Dans ce secteur-là, nous avons assisté ponctuellement le PMA de la sécurité civile au profit des civils en partenariat avec trois unités médicales militaires, BSPP, BMPM et l’UIISC7 de Nogent-le-Rotrou en nous relayant. Et notre autre axe de travail a été le service de soutien opérationnel aux pompiers et aux forces de l’ordre. De manière globale, nous avions fait un peu de médecine au début, puis notre mission s’est orientée vers du conseil. En collaboration avec le docteur Lostie de Kerhor de la sécurité civile qui avait une expertise en médecine de catastrophe, nous avions fait notamment l’audit des hôpitaux et des différentes structures pour proposer des solutions d’adaptation pour l’État et d’anticipation de dégradation.
Retenez-vous un moment marquant de cette mission ?
Si je devais retenir un moment… Certainement la relève que nous avons assurée lors de notre arrivée pour les gens qui étaient sur le PMA depuis une semaine. Ce qui m’a marqué, c’est l’épuisement des personnes que nous avons rencontrées. Ils avaient dû travailler non-stop les dix premiers jours avant notre arrivée, sans relève et avec les moyens du bord. Leur force d’adaptation m’avait particulièrement impressionné. Lors de notre arrivée le dimanche, le niveau d’épuisement était très important. La mission se résumait presque à ça, notre rôle était de les relever, la plupart d’ailleurs ne voulaient pas de relève, car ils avaient l’impression d’abandonner leur travail. Nous nous sommes positionnés en support, soit en les conseillant, soit en récupérant un peu de leur charge de travail très importante. Au début, nous étions partis pour quinze jours, puis nous avons été prolongés d’un mois. Il était clair que la situation ne se serait pas rétablie en si peu de temps.
Propos recueillis par le 1CL Raphaël Orlando
Interview du LCL Christophe Perdrisot
Le lieutenant-colonel Perdrisot a, quant à lui, fermé le détachement. Il nous livre ses impressions au moment de quitter Nouméa.