Web-série — Sens du commandement, rigueur administrative, encadrement sportif et conseiller du commandement : en centre de secours, le sergent-chef joue un rôle-clé. Chef de garde incendie, il est le véritable chef d’orchestre pour la troupe. Le sergent-chef Yohan R., chef de garde incendie au centre de secours Bondy, nous explique les particularités de sa fonction.
Dans la cour du centre de secours Bondy, le soleil se lève à peine mais les 24 soldats du feu s’affairent déjà à leurs missions. Il est 7 h 45 lorsque le rassemblement sonne pour la garde incendie la plus importante de la BSPP. Le sergent-chef Yohan R., chef de garde du jour, se présente devant ses hommes. Regard droit, crâne rasé et à l’allure robuste, il dicte le déroulement de la matinée. Passionné de saut en parachute, le Picard d’origine ne sait toujours pas comment lui est venue la vocation de soldat du feu. « C’était sûrement inné… » entame-t-il. Homme d’action, il fête cette année ses dix-huit ans d’aventures au sein de la BSPP, dont la moitié en tant que chef de garde.
« Le chef de garde, c’est celui qui détient les clés », confie le sous-officier. La première de ces clés est « opérationnelle », celle de l’urgence. « Lorsqu’il arrive sur intervention, la première mission du chef de garde est d’organiser le chaos » souligne le sergent-chef R.. Le chef de garde a l’initiative absolue des mesures à prendre et des moyens à engager. Il a le devoir de pénétrer dans les locaux où il juge nécessaire d’intervenir. « Il a la responsabilité d’engager ses femmes et hommes au feu » évoque-t-il avec conviction. La prise de décisions en première urgence fait partie de ses prérogatives, et c’est cette adrénaline opérationnelle qui l’anime.
La seconde clé au trousseau du chef de garde est la clé administrative, « pendant la garde, il est celui qui fait la météo. C’est une facette du chef qui est importante, nous sommes là pour faire du bien, pour que chaque sapeur soit heureux de venir prendre sa garde. Si nous obtenons cela, nous obtenons l’adhésion de nos hommes ». En centre de secours, au-delà de ses fonctions opérationnelles qui lui sont propres, le chef de garde a un rôle multifacette. Le temps d’une garde, il peut occuper les fonctions de chef du centre de secours, de sous-officier administratif, de sous-officier responsable de l’habillement ou de tout ce qui touche à la vie en caserne.
À cœur d’être exemplaire
Une des clés qu’affectionne plus particulièrement le sergent-chef R. est celle du sport. Véritable outil d’intégration et de cohésion, « le sport permet de découvrir ses hommes, de partager et d’être dans la douleur avec eux, c’est primordial pour créer du lien ». Le sergent-chef Yohan, après dix-huit ans de service, a toujours à cœur d’être exemplaire. Son domaine de prédilection : le grimper de cordes, en challenge à la BSPP ou en compétition au championnat d’Europe. « Je pense que mon quota de cordes est bien atteint pour le reste de ma carrière » évoque-t-il en souriant. « Au-delà de l’aspect physique, le sport me permet, en tant que chef de garde, de jauger la troupe pour amener tout le monde vers le plus haut et de tendre vers l’exemplarité. »
La dernière clé du trousseau est celle du « sachant ». Le chef de garde est aussi celui qui transmet le savoir à tous les échelons inférieurs. Du jeune sapeur qui apprend à dérouler un tuyau jusqu’au sergent qui prépare le diplôme de chef de garde, « la transmission de savoir est très importante pour moi. À la fin de la journée, ma satisfaction est d’avoir partagé de bons moments en sport et d’avoir enseigné quelques astuces lors de la manœuvre ». Pour lui, l’enjeu est de travailler en confiance. Le sous-officier conclut avec humilité, « le bon sens, le respect et la confiance que l’on accorde et que les subalternes nous accordent en tant que chef sont les ingrédients pour faire une bonne marmite dans laquelle nous sommes contents de venir manger ».
L’intervention marquante
« En tant que chef de garde, j’ai eu la chance d’avoir demandé un renfort incendie l’année dernière à Montreuil. Cette intervention fut très enrichissante, car j’ai mis en pratique tout ce que j’ai appris en théorie. Il s’agissait d’un feu d’entrepôt de 3 000 m² de stockage de bois. Lorsque nous sommes arrivés sur place, tout était déjà embrasé. J’avais ma manœuvre en tête, je devais conseiller le commandant des opérations de secours tout en veillant sur la sécurité de mes hommes. Ce fut pour moi une intervention très intéressante, d’un point de vue commandement et gestion d’une opération d’ampleur avec beaucoup de réflexion tactique. »