DOSSIER — La récupération du sapeur-pompier (3/4) : L'aspect psychologique

Harry Couvin
15 octobre 2023
Manon Peneaud —  — Modi­fiée le 25 juillet 2024 à 21 h 14 

Grands formats – Créée en 2005, et dirigée par lieutenant-colonel Matthieu Petitclerc, officier psychologue, la section médico-psychologique a quatre missions principales : la prise en compte des interventions à fort retentissement psychologique, la formation, les entretiens cliniques et le conseil au commandement.

La récu­pé­ra­tion après une inter­ven­tion à fort reten­tis­se­ment psy­cho­lo­gique est essen­tielle pour per­mettre aux pom­piers de se recon­di­tion­ner men­ta­le­ment et émo­tion­nel­le­ment. Cela néces­site un temps dédié à la récu­pé­ra­tion phy­sique, phy­sio­lo­gique et psy­cho­lo­gique. « Les pom­piers peuvent être confron­tés à des images, des sons ou des odeurs ravi­vant des émo­tions liées à des inter­ven­tions pas­sées, explique le lieu­te­nant-colo­nel Mat­thieu Petit­clerc, offi­cier psy­cho­logue à la Bri­gade. Une simple enseigne de maga­sin peut évo­quer un type d’intervention par­ti­cu­lier. » Une des dif­fi­cul­tés spé­ci­fiques aux pom­piers de Paris est d’être confron­tés à des inter­ven­tions dans des lieux fami­liers de leur vie quo­ti­dienne, en dehors du tra­vail. Cela peut ren­for­cer l’impact psy­cho­lo­gique des inter­ven­tions et rendre la récu­pé­ra­tion encore plus importante.

Prin­cipe de sub­si­dia­ri­té. À la Bri­gade, les cadres de contact jouent un rôle clé dans la faci­li­ta­tion de la récu­pé­ra­tion. Contrai­re­ment aux mili­taires qui ont un sas de décom­pres­sion à la fin d’une mis­sion, les pom­piers béné­fi­cient d’un cadre de contact qui éva­lue la situa­tion et peut faire appel au psy­cho­logue si néces­saire. « Ce cadre assure un pre­mier sou­tien en orga­ni­sant un temps d’échange, à la suite d’une inter­ven­tion à fort reten­tis­se­ment psy­cho­lo­gique, où cha­cun ver­ba­lise et par­tage son expé­rience vécue, avance l’officier psy­cho­logue. C’est ce que nous appe­lons le defu­sing. » Les cadres, grâce à leur expé­rience, contri­buent à la récu­pé­ra­tion en trans­met­tant aux plus jeunes leur capa­ci­té à prendre du recul après des inter­ven­tions lourdes. Cepen­dant, la récu­pé­ra­tion ne concerne pas seule­ment les inter­ven­tions, elle com­prend éga­le­ment les contraintes de plan­ning. Par exemple, des périodes de garde consé­cu­tives ou des années d’activité intense dans une caserne peuvent néces­si­ter une récu­pé­ra­tion adap­tée. Il est donc essen­tiel de pro­po­ser des tra­jec­toires pro­fes­sion­nelles per­met­tant de varier les types de postes et d’alterner les périodes plus ou moins sollicitantes.

Accom­pa­gne­ment psy­cho­lo­gique. Les psy­cho­logues sont pré­sents dès l’incorporation en pro­po­sant une sen­si­bi­li­sa­tion de trois heures sur les risques psy­cho­lo­giques aux­quels les pom­piers sont expo­sés ain­si que sur les com­por­te­ments inha­bi­tuels et la souf­france psy­chique de cer­taines vic­times qu’ils vont secou­rir. Les psy­cho­logues sont éga­le­ment un appui tout au long du par­cours des pom­piers, offrant un sou­tien en cas de besoin. Par­fois, le defu­sing n’est pas suf­fi­sant pour récu­pé­rer et un sui­vi pro­lon­gé est néces­saire pour appro­fon­dir cer­taines situa­tions com­plexes.
Dans de tels cas, les psy­cho­logues peuvent contac­ter les per­sonnes concer­nées par télé­phone, leur lais­sant le temps qu’il faut pour prendre du recul et récu­pé­rer. Le sou­tien de l’esprit de corps et des frères d’armes reste le pre­mier levier de pré­ven­tion. Le per­son­nel de san­té, psy­cho­logues et méde­cins, sont en appui du com­man­de­ment. Pour les cas les plus affec­tés, il est pos­sible de se tour­ner vers les hôpi­taux mili­taires et les psy­chiatres. Cepen­dant, cer­tains freins sub­sistent, tels que la crainte de stig­ma­ti­sa­tion ou de juge­ment. Il est donc cru­cial de créer un envi­ron­ne­ment de tra­vail qui encou­rage la récu­pé­ra­tion et de pro­mou­voir une com­pré­hen­sion col­lec­tive des enjeux psy­cho­lo­giques aux­quels les pom­piers sont confron­tés.
En conclu­sion, une bonne récu­pé­ra­tion psy­cho­lo­gique est essen­tielle pour le bien-être des pom­piers. Il ne s’agit pas d’oublier ce qui s’est pas­sé, mais plu­tôt d’intégrer les évé­ne­ments dans un conti­nuum de vie. Les pom­piers doivent être sou­te­nus dans leur récu­pé­ra­tion, tant sur le plan indi­vi­duel que col­lec­tif, afin de pou­voir plei­ne­ment pro­fi­ter de leur vie per­son­nelle et familiale. 



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