DOSSIER PRÉVENTION (1) — Un enjeu majeur

LCL Fabien Moigne —  — Modi­fiée le 21 juin 2024 à 10 h 23 

Grands formats — Pour éviter les drames, la prévention travaille en amont. Réglementation, certification, et même conseils, les préventionnistes sont confrontés à de multiples sujets, parfois très sensibles. Pour mieux saisir le sujet, nous ouvrons ce dossier majeur tout au long de cette semaine. Dans ce premier volet, le lieutenant-colonel Moigne, chef du bureau Prévention nous fixe le décor.

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Pre­mier maillon du conti­nuum pré­ven­tion-pré­vi­sion-opé­ra­tion, la pré­ven­tion contre les risques d’incendie regroupe l’ensemble des règles dont l’objectif géné­ral est d’implanter, conce­voir, construire, exploi­ter et main­te­nir les bâti­ments de manière, tout d’abord, à évi­ter l’éclosion d’un incen­die. Ensuite, si celui-ci se pro­duit, per­mettre de limi­ter son déve­lop­pe­ment, sa pro­pa­ga­tion, ses effets sur les per­sonnes et faci­li­ter l’intervention des secours. Cet objec­tif glo­bal est décrit à l’article L. 141 – 1 du Code de la construc­tion et de l’habitation (CCH). Il s’applique aux éta­blis­se­ments rece­vant du public (ERP), aux bâti­ments d’habitation, aux bâti­ments à usage pro­fes­sion­nel (BUP) et aux immeubles de moyenne et grande hau­teur (IMH, IGH).

Ces règles pres­crip­tives, basées sur des règle­ments datant majo­ri­tai­re­ment des années 1980, ont très sou­vent besoin d’être com­plé­tées par une ana­lyse de risque. En effet, les évo­lu­tions tech­niques, socié­tales et éco­lo­giques, ont un impact majeur sur les construc­tions. Les por­teurs de pro­jet for­mulent de plus en plus de demandes de déro­ga­tions que les cadres du bureau pré­ven­tion ins­truisent en se basant sur leur riche expé­rience opérationnelle.

Le lieu­te­nant-colo­nel Fabien Moigne sur intervention

Tra­vailleurs de l’ombre, les pré­ven­tion­nistes sont ain­si confron­tés à des sujets sou­vent très sen­sibles : mise en sécu­ri­té de bâti­ments ins­ti­tu­tion­nels, pro­jets nova­teurs, modes de construc­tion inno­vants, usages des bâti­ments évo­lu­tifs, etc. Or, les règle­ments ne couvrent pas ces nou­veaux usages et il faut régu­liè­re­ment s’adapter et accom­pa­gner les maî­trises d’œuvre dans leur recherche de solu­tions qui garan­tissent un niveau de sécu­ri­té satis­fai­sant, tant pour les occu­pants que pour les intervenants.

Pour faire face à ces évo­lu­tions, le bureau pré­ven­tion est asso­cié à l’essentiel des groupes de tra­vail visant à la révi­sion des règle­ments de sécu­ri­té. Ces der­nières années, un panel d’officiers du bureau a par­ti­ci­pé aux réflexions natio­nales sur dif­fé­rentes thé­ma­tiques, à savoir : la révi­sion du CCH dans le cadre de la loi ESSOC1, les IMH à tra­vers la loi ELAN2, les parcs de sta­tion­ne­ment cou­vert, les ins­tal­la­tions pro­vi­soires, les construc­tions en maté­riaux bio­sour­cés, etc.

Pour mettre en œuvre ces règle­ments dans le cadre des études qui lui sont sou­mises, le bureau pré­ven­tion s’appuie sur ses 35 offi­ciers, 39 sous-offi­ciers et 18 mili­taires du rang. Com­pé­tents sur quatre dépar­te­ments, Paris et la petite cou­ronne, les pré­ven­tion­nistes ins­truisent les per­mis de construire et les demandes d’aménagements de tout type de bâti­ments (éta­blis­se­ments rece­vant du public, habi­ta­tion, bâti­ments à usage pro­fes­sion­nel), soit une moyenne de 12 000 avis par an. En outre, pour trai­ter les gares, les tun­nels, les trans­ports gui­dés, les ins­tal­la­tions clas­sées pour la pro­tec­tion de l’environnement (ICPE) et la défense exté­rieure contre l’incendie (DECI), le chef du bureau pré­ven­tion s’appuie sur la sec­tion pré­vi­sion tech­nique. Les pla­te­formes aéro­por­tuaires entre­ront éga­le­ment dans le champ de com­pé­tence de cette sec­tion très par­ti­cu­lière cet été, à l’occasion de la réor­ga­ni­sa­tion du bureau.

En com­plé­ment des études de dos­siers, les cadres du BPREV réa­lisent les visites des éta­blis­se­ments rece­vant du public dans le cadre des com­mis­sions dépar­te­men­tales de la com­mis­sion de sécu­ri­té. Ils effec­tuent éga­le­ment des visites de véri­fi­ca­tions des règles construc­tives dans les bâti­ments d’habitation. Ces der­nières laissent sou­vent appa­raître des non-confor­mi­tés majeures dans des bâti­ments pour­tant neufs !

La pré­ven­tion demande de grandes connais­sances tech­niques et opérationnelles

Véri­table vivier de com­pé­tences et d’expériences, le bureau pré­ven­tion réa­lise un grand nombre de for­ma­tions tant au pro­fit des cadres de la BSPP que des sapeurs-pom­piers des SDIS. Au total, c’est plus d’un mil­lier d’heures de for­ma­tion dis­pen­sées chaque année.

Sur le plan opé­ra­tion­nel, le bureau a la par­ti­cu­la­ri­té d’armer les piquets d’officier de garde sécu­ri­té et pré­ven­tion. L’officier sécu­ri­té a pour mis­sion de s’assurer que les inter­ve­nants s’engagent dans des condi­tions de sécu­ri­té satis­fai­santes. L’officier pré­ven­tion peut avoir plu­sieurs mis­sions : conseiller le Com­man­dant des opé­ra­tions de secours (COS) sur les aspects bâti­men­taires, s’assurer de la bonne mise en œuvre des moyens tech­niques propres à l’établissement (sys­tème de sécu­ri­té incen­die, désen­fu­mage, etc.), conce­voir une manœuvre de ven­ti­la­tion opé­ra­tion­nelle, aider à la répar­ti­tion des engins sur les hydran ts lors des grands feux, etc. En outre, cer­tains cadres assurent la garde RCCI (Recherche des causes et cir­cons­tances de l’incendie). Leurs connais­sances des règle­ments et des carac­té­ris­tiques des incen­dies leur per­mettent ain­si de contri­buer à la fonc­tion RETEX (retour d’expérience) pilo­tée par le bureau pla­ni­fi­ca­tion opérationnelle.

En résu­mé, le bureau agit sur tout le spectre pré­ven­tion-pré­vi­sion-opé­ra­tion, la pré­ven­tion et la pré­vi­sion per­met­tant d’améliorer les condi­tions d’intervention et l’opération ser­vant à accroître leur expé­rience et à nour­rir leurs ana­lyses dans le cadre des études de dos­sier et des visites. La pré­ven­tion est un métier exi­geant et noble, car elle demande de grandes connais­sances tech­niques et opé­ra­tion­nelles qui contri­buent in fine à assu­rer la sécu­ri­té de la popu­la­tion et celle des intervenants.

Photos SCH Nicholas Bady et CCH Marc Loukachine 

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  1. Loi n° 2018 – 727 du 10 août 2018 pour un État au ser­vice d’une socié­té de confiance. ↩︎
  2. Loi n° 2018 – 1021 por­tant évo­lu­tion du loge­ment, de l’aménagement et du numé­rique. ↩︎
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