CAMION DE DÉSINCARCÉRATION — L’arme ultime du secours routier

Jona­than Nae­gé­lé —  — Modi­fiée le 5 sep­tembre 2025 à 10 h 33 

#BrigadeInside — Véritable couteau suisse de l’urgence et du secours routier, le camion de désincarcération (CD) de la BSPP a été conçu comme une boîte à outils prête à être envoyée rapidement sur les accidents de la route et les interventions complexes. Il en existe trois sur le secteur Brigade, un par groupement d’incendie. Et pour chacun, entre 200 et 400 départs par an.

Au centre de secours de Puteaux, le CD du troi­sième grou­pe­ment est dans la moyenne haute des départs, en défen­dant un sec­teur riche en infra­struc­tures rou­tières, tun­nels et échan­geurs. Si le camion en lui-même reste d’apparence clas­sique, le maté­riel qu’il contient a été moder­ni­sé et allé­gé afin d’optimiser la place tout en étant plus effi­cace sur inter­ven­tion. « On est pas­sé d’un engin un peu fourre-tout, avec du maté­riel lourd, moins maniable, fonc­tion­nant sur un géné­ra­teur élec­trique bruyant et encom­brant, à du maté­riel élec­trique sur bat­te­rie qui devient la norme aujourd’hui », indique l’adjudant-chef Fré­dé­ric Lou­vel, chef du CS Puteaux.

Majo­ri­tai­re­ment enga­gé sur du secours rou­tier, le CD peut aus­si être son­né pour des inter­ven­tions sur feu lorsque cela néces­site de la découpe, du levage, du déblai com­plexe. Armé par trois sapeurs-pom­piers for­més pour appli­quer les meilleures solu­tions en un temps record, il peut être indis­pen­sable sur des situa­tions inha­bi­tuelles comme des per­sonnes blo­quées ou des ani­maux coin­cés. « Le camion doit res­ter un engin d’intervention rapide, pré­cise le chef de centre. Lorsqu’il s’agit de mis­sions lourdes et com­plexes, par­fois longues, cela revient au RSMU spé­cia­le­ment for­mé et équi­pé pour cela. »

Dans le ventre du CD. Par­mi les très nom­breux outils à dis­po­si­tion du chef d’agrès ou des équi­piers, deux sont incon­tour­nables : l’écarteur et la cisaille. Affi­chant un poids de 17 kg pour le modèle le plus impo­sant, l’écarteur paraît petit, mais déploie une puis­sance consi­dé­rable. Sa force maxi­male, mesu­rée en kilo­new­tons, équi­vaut à 5 tonnes, soit 501 kN. En écra­se­ment, l’écarteur qui devient écra­seur déve­loppe une force de 144 kN, soit 1,5 tonne environ.

Maniant l’outil avec une habi­le­té acquise au fil des inter­ven­tions, le ser­gent James Cha­nut, chef d’agrès du CD à Puteaux, explique que « l’avantage de ce modèle, c’est sur­tout l’ensemble des acces­soires qui per­mettent de l’utiliser dans dif­fé­rentes confi­gu­ra­tions, comme la patine qui se fixe sur la par­tie infé­rieure pour faire appui avec le sol et lever rapi­de­ment un véhi­cule sur plu­sieurs dizaines de centimètres ».

Au même titre que l’écarteur, la cisaille joue un rôle fon­da­men­tal. Conçue pour décou­per barres, tôles et métaux dits vides ou creux, elle exige d’être conscien­cieux pour évi­ter les bles­sures. Le ser­gent Hakim Cher­kaoui, chef d’agrès CD lui aus­si, indique qu’un entraî­ne­ment régu­lier des sapeurs est néces­saire au main­tien des savoir-faire. « On doit s’exercer sur de vrais véhi­cules, car une mau­vaise découpe de tôle pré­sente un risque impor­tant à la fois pour les vic­times et pour les sapeurs, ajoute le sous-offi­cier du CS. En com­plé­ment, nous uti­li­sons un lot de pro­tec­tion pour la découpe que l’on fixe avec des sortes de pinces, c’est indis­pen­sable. » Der­niè­re­ment, c’est sur les wagons d’un train entier que les pom­piers de Puteaux ont pu tra­vailler, en lien avec la SNCF. « Une belle jour­née de cohé­sion ! » sou­ligne en sou­riant le ser­gent. En y ajou­tant l’une des deux dis­queuses, l’équipage du CD peut décou­per à peu près tout sur intervention.

Bien armé pour toute inter­ven­tion. D’autres outils moins impo­sants ou moins connus font par­tie du lot. Si le Stab-Fast per­met de sta­bi­li­ser les véhi­cules retour­nés — légers ou poids lourds — au moyen de sangles et d’un sys­tème d’équilibres, le tire-fort et le treuil à l’avant du camion peuvent être employés pour le dépla­ce­ment de charges lourdes. La fameuse scie à chaîne est éga­le­ment de la par­tie, indis­pen­sable à tout pom­pier de Paris employé sur de l’élagage, tan­dis que les per­ceuses, meu­leuses et trousses à outils simples res­tent la base indis­pen­sable. En inter­ven­tions noc­turnes, fré­quentes lorsqu’il s’agit de secours rou­tier, les sapeurs peuvent s’appuyer sur dif­fé­rents moyens d’éclairage, notam­ment des pro­jec­teurs sur bat­te­ries et des spots fixés sur le camion.

La solu­tion adé­quate à une situa­tion com­plexe
Décou­per, écar­ter, défor­mer ou refor­mer ne sont pas tou­jours des solu­tions per­ti­nentes. « Aujourd’hui, sur les secours rou­tiers et avec la com­plexi­té des nou­veaux véhi­cules, on pré­fère dévis­ser quelques vis ou bou­lons pour décro­cher une por­tière que décou­per de la tôle » lance le ser­gent Cha­nut, dix ans de ser­vice, évo­quant l’évolution sans fin de l’industrie auto­mo­bile. Pour le chef d’agrès du CD, l’objectif est d’élaborer un plan d’urgence en uti­li­sant les outils appropriés.

À l’aide d’une appli­ca­tion sur tablette, il est désor­mais pos­sible d’obtenir rapi­de­ment les carac­té­ris­tiques tech­niques et phy­siques d’un véhi­cule en scan­nant la plaque d’immatriculation ou un QR code pour cer­taines marques. « C’est essen­tiel pour tra­vailler en sécu­ri­té, ajoute-t-il. On obtient des ren­sei­gne­ments pré­cis, des images et des sché­mas sur tout ce qui peut être dan­ge­reux pour nous ou la vic­time lors des manœuvres de dés­in­car­cé­ra­tion, comme la loca­li­sa­tion des air­bags ou celle des batteries. »

Le CD du futur. Aujourd’hui, grâce à un maté­riel tou­jours plus per­for­mant et une for­ma­tion rigou­reuse des sapeurs, le camion de dés­in­car­cé­ra­tion reste la réfé­rence en matière de secours rou­tier, capable de s’adapter aux nom­breux défis du ter­rain. Celui de Puteaux n’est plus tout jeune. L’ancien camion de Lan­don réaf­fec­té au CS il y a quelques années, a connu les pavés pari­siens et, avec près de 100 000 km au comp­teur, l’usure se fait sen­tir. Cou­rant 2025, il devra être rem­pla­cé par un engin de nou­velle géné­ra­tion qui, avant ça, aura eu l’honneur de défi­ler sur les Champs-Ély­sées pour le 14 juillet. Vous pour­rez le décou­vrir en détail dans une pro­chaine édi­tion d’Allo 18.

Photos : SCH Nicholas Bady


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