#BrigadeInside — Le groupement de formation d’instruction et de secours (GFIS) rénove sa formation initiale. Désormais, les recrues du fort de Villeneuve-Saint-Georges seront formées aux techniques de chef d’équipe. Cette formation permettra de donner un niveau de qualification technique supérieur au binôme lors d’un engagement sur feu. Le capitaine Philippe L. P., commandant adjoint de la compagnie de formation n°1 (CDF1), nous explique les tenants et les aboutissants de ce projet.
La BSPP s’est toujours inscrite dans une démarche d’optimisation de son parcours de formation. Ainsi, pendant des décennies, la formation initiale s’est focalisée sur la fonction d’équipier alors que dans le cadre de l’apprentissage du travail du binôme, lors des mises en situation professionnelle, la recrue occupe alternativement la fonction d’équipier et de chef d’équipe.
« Nombreux sont les sapeurs de première classe ayant déjà pris des fonctions de chef d’équipe en compagnie d’incendie » souligne le capitaine. Seulement, ce rôle doit être principalement attribué à un gradé, soit caporal, soit caporal-chef. En effet, lors de sa formation au peloton des élèves caporaux (PEC), le futur gradé apprend non seulement à devenir un chef en opération, mais il assimile aussi des techniques spécifiques à la fonction de chef d’équipe. Ces techniques-là ne sont pas apprises par les recrues lors de leur formation initiale.
Le principe de cette réforme est donc de valoriser le temps passé dans les fonctions de chef d’équipe en évaluant un double niveau de compétence.
Comment former les recrues à la mise en œuvre de ces techniques à empreinte formative constante ? Sous l’impulsion du capitaine, le groupe de travail se lance afin de pouvoir répondre à cette question. L’année 2020 est, quant à elle, bouleversée par une pandémie mondiale. Le fort de Villeneuve-Saint-Georges se vide, les recrues sont ventilées, plus aucun chant ne résonne sous les voûtes. L’occasion est parfaite pour entamer un travail de fond et rénover la formation initiale.
Les objectifs de cette réforme sont multiples, mais le principal est de donner au binôme un niveau de qualification technique et mental supérieur lors de son engagement sur feu. « Cela nous permet de gagner en sécurité pour le chef, le servant, mais aussi pour le citoyen. » Au prix de nombreuses heures de réflexion, le commandement de la CDF1 propose une solution optimale garantissant un niveau de performance compatible à un engagement opérationnel au terme de quatre mois de formation.
Concrètement, certains modules sont accentués dans la formation. Principalement, ce sont les modules « incendie », « reconnaissances » et « secours à victimes » qui ont vu leur volume horaire augmenter. Le module « sauvetage du sauveteur » a quant à lui été créé. L’épreuve d’admission en compagnie d’incendie et de secours est supprimée, les recrues seront désormais évaluées en contrôle continu : « l’idéal est de se rapprocher le plus possible du terrain opérationnel et de privilégier des simulations d’interventions complètes » justifie le capitaine. L’ancrage des connaissances se fait à présent sur quatre mois et non plus sur des périodes identifiées. Parallèlement, l’enseignement à distance prend lui aussi de l’ampleur. Avant sa rentrée au fort, « la future recrue se devra d’apprendre certains items indispensables de la vie de sapeur-pompier militaire tels que les grades, la Marseillaise, l’éthique et le code d’honneur » souligne l’officier.
La « densification » du sapeur-pompier de Paris
C’est sans doute le module « reconnaissance » qui est le plus novateur dans cette formation initiale de dernière génération. En effet, afin de parfaire leur technique, les recrues vont pouvoir évoluer dans des conditions réelles d’un feu de cave. Dans l’antre des caves à fumées, ressenti de la chaleur, analyse du plafond de fumée, lecture du feu, apprentissage des techniques de reconnaissance et utilisation de la caméra thermique, gestion du stress : toutes les conditions sont réunies pour aguerrir au mieux ces futurs soldats du feu. Des travaux de réhabilitation des caves du fort de Villeneuve ont été entrepris, avec l’appui précieux du bureau soutien infrastructure, en vue d’accueillir ces exercices taille réelle.
Cette formation initiale rénovée propose ainsi une meilleure progressivité dans le domaine de l’incendie avec, pour exemple, 90 heures sur le bloc reconnaissance contre 70 dans l’ancienne version.
Un PEC plus court
Former les recrues aux techniques de chef d’équipe a une réelle plus-value en terme de gestion des ressources humaines. En effet, lors de leur cursus d’avancement, les recrues passeront désormais au PEC avec les qualifications techniques déjà acquises. Il ne sera donc pas nécessaire de les former à des gestes déjà assimilés. Le commandement du GFIS a ainsi pu proposer une réduction de deux semaines de la durée du PEC. Au-delà du module chef d’agrès moyen élévateur aérien (MEA), ce stage aura pour objectif de confirmer les qualifications acquises, mais aussi et surtout de se recentrer sur le rôle du chef. Cette réduction de l’empreinte formation du PEC est un gain significatif en terme de « gestion du temps d’activité » en centre de secours.
Les caves à fumées chaudes
Le point de vue du nouveau formateur : Sergent Fabrice L. C.
Quelle est la plus-value pour les recrues ?
La présence d’un foyer réel va permettre à la recrue d’avoir un vrai ressenti de la chaleur, de sentir ses propres limites et d’avoir des conditions d’engagement proches de ce qu’elle retrouvera sur un feu.
Quel est l’objectif pour le stagiaire ?
Le stagiaire doit comprendre l’intérêt et la plus-value apportés par les matériels dont il dispose lors d’une reconnaissance (lampe, caméra thermique, instrument de contrôle et de sécurité) mais aussi le but du « TOP silence », l’importance de l’élocution… Il apprend par ailleurs à se servir de ses sens et notamment de l’ouïe pour repérer le foyer et s’orienter dans l’espace.
Qu’avez-vous appris lors de votre passage en cave à fumées ?
En tant que nouveau formateur, nous apprenons le déroulé du passage à l’intérieur de la cave. La cave à fumées chaudes est un outil pédagogique avec lequel nous devons nous familiariser pour mettre toutes les techniques en application avec les recrues.
Créée en août 2020, la direction générale de la formation (DGF) est un nouvel échelon de coordination, de suivi et de pilotage de l’ensemble des actions de formation dispensées par le GFIS.
Cette nouvelle entité veille à la qualité et à la cohérence des actions de formation. Elle réalise l’ingénierie pédagogique des stages de formation, développe la numérisation de son espace de formation et s’assure du respect de la certification ISO 9001 dont bénéficie le groupement.
Cette direction est, en outre, l’interlocutrice privilégiée de l’état-major de la BSPP et des groupements pour tout ce qui concerne les travaux d’ingénierie de formation. Elle regroupe en son sein les pilotes des domaines secours à personne, incendie, tir et NRBC. Enfin, elle préfigure la nouvelle organisation et le fonctionnement de la future école de formation à l’horizon 2023 sur le site de Limeil-Valenton-Villeneuve-Saint-Georges (LVV).
La direction générale de la formation a deux missions principales : la coordination et le pilotage de l’ensemble des formations ainsi que la participation aux études prospectives.
LE MOT DU DIRECTEUR
Le capitaine Christophe C. est le premier officier à occuper la fonction de directeur général de la formation. Son rôle est de « mettre de la cohérence au sein de la formation. Au GFIS, nous dispensons chaque année environ 150 000 journées-élèves au travers de 140 actions de formation différentes, explique-t-il. Nous disposons de la première école de sapeurs-pompiers d’Europe, il faut donc avoir une organisation et un fonctionnement éprouvés et résilients. »
Interlocuteur direct du chef de corps du GFIS et des bureaux de l’état-major central, le capitaine pilote l’ensemble des activités de formation en veillant à la coordination entre les compagnies chargées de la conduite des stages et la compagnie responsable de la logistique.