VOEUX 2020 — Général Jean-Marie Gontier

#BrigadeInside — En direct de l’état-major de Champerret, le général Jean-Marie Gontier commandant la brigade de sapeurs-pompiers de Paris présente ses voeux pour 2020. 

La rédac­tion Allo18 —  — Modi­fiée le 3 mai 2021 à 01 h 35 

Ver­sion audio…

Offi­ciers, méde­cins, sous-offi­ciers, infir­miers, gra­dés et sapeurs,
chers tous,
Au seuil de cette nou­velle année, per­met­tez-moi de reve­nir quelque peu sur 2019 puis de vous expri­mer avec quelle confiance nous devons abor­der 2020.
2019, ce fut d’abord la dis­pa­ri­tion de nos deux com­pa­gnons d’armes, morts au feu : le capo­ral Jos­se­lin et le ser­gent Car­tan­naz. Par leur sacri­fice suprême, nos cama­rades ont illus­tré de façon tra­gique l’engagement des sapeurs-pom­piers de Paris et la devise de la Bri­gade « sau­ver ou périr ». Soyez convain­cus que leur sacri­fice n’a pas été vain, leur sacri­fice nous oblige par les vies qu’ils ont réus­si à pré­ser­ver.
Mais 2019, ce furent éga­le­ment 321 sau­ve­tages sur feu et 119 sapeurs-pom­piers de Paris bles­sés en inter­ven­tion. Cela montre, une fois de plus, que la Bri­gade n’est pas une uni­té comme les autres, que les condi­tions d’engagement sur Paris et la petite cou­ronne sont bien spé­ci­fiques, bien plus com­plexes et périlleuses qu’ailleurs. Et c’est pour cela qu’une pré­pa­ra­tion opé­ra­tion­nelle exi­geante et la conduite d’exercices régu­liers sont indis­pen­sables…
2019, ce furent aus­si plu­sieurs séquences opé­ra­tion­nelles extra­or­di­naires comme, je l’évoquais pré­cé­dem­ment, l’explosion de la rue de Tré­vise, l’incendie dra­ma­tique de la rue Erlan­ger et le nombre excep­tion­nel de sau­ve­tages réa­li­sés dans des condi­tions d’audace et de prise de risques rare­ment éga­lées et bien sûr l’incendie de Notre Dame de Paris et en paral­lèle les évè­ne­ments sociaux qui ont moti­vé un niveau de réponse opé­ra­tion­nelle sou­te­nu durant toute l’année 2019. Ce que vous avez mon­tré en ces occa­sions, tous grou­pe­ments confon­dus, fut remar­quable et jus­ti­fie une fois de plus la per­ti­nence de notre orga­ni­sa­tion inter­dé­par­te­men­tale et de notre sta­tut mili­taire. Soyez fiers d’appartenir à cette uni­té d’élite, c’est avant tout l’action de cha­cune et cha­cun d’entre vous et le col­lec­tif qui sont remar­quables. Cela ne souffre aucune com­pa­rai­son.
2019, ce furent près de 507 000 inter­ven­tions, soit 3 % de moins qu’en 2018 ! Et la pre­mière fois sur la décen­nie que nous arri­vons à agir sur l’inflation de la demande de secours d’urgence sur notre sec­teur. Mais ce satis­fe­cit doit être rela­ti­vi­sé. Le modèle Bri­gade est conçu pour absor­ber 450 000 inter­ven­tions… La sur­chauffe est tou­jours pré­gnante. Ces chiffres révèlent de manière bien réelle votre quo­ti­dien. Les VSAV à plus de 10 sor­ties, le rythme de garde, les 2 mil­lions d’appels reçus au CO, et je n’évoque pas ici les 15 000 feux, les acti­va­tions quo­ti­diennes de l‘EMO… L’état-major s’est enga­gé depuis des mois dans un tra­vail de fond qui se tra­duit par de longs tra­vaux et échanges avec les dif­fé­rents acteurs que sont l’Agence régio­nale de san­té, les SAMU et l’AP-HP pour réduire cette charge, pour éva­luer plus pré­ci­sé­ment ce qui est évi­table en termes de départs, pour recen­trer la Bri­gade sur sa mis­sion. Sa rai­son d’être objec­tive. Ces échanges sont néces­saires, ils portent d’ores et déjà leurs fruits, et ils abou­ti­ront à terme à une meilleure orien­ta­tion médi­cale des appels… Et cette meilleure orien­ta­tion devrait enrayer dura­ble­ment l’augmentation de notre acti­vi­té. Soyez convain­cus que nos auto­ri­tés de tutelle ont enten­du nos inquié­tudes et par­fois notre las­si­tude. Cette lutte, est, vous le savez, LA prio­ri­té. J’adresse ici un satis­fe­cit par­ti­cu­lier au bureau opé­ra­tions et pré­pa­ra­tion opé­ra­tion­nelle et aux opé­ra­teurs du CO, éga­le­ment aux méde­cins et infir­miers du Bureau de la méde­cine d’urgence pour le tra­vail déjà accom­pli !
2019, ce furent encore un nombre d’agressions envers les secours en constante aug­men­ta­tion. Ce constat et le meurtre du capo­ral Hen­ry en 2018 nous ont pous­sés à déployer des mesures propres à aug­men­ter le niveau de sécu­ri­té des mili­taires du corps. Là encore l’ensemble de la Bri­gade a su se mobi­li­ser pour trou­ver des réponses internes et externes en liai­son avec nos par­te­naires, en par­ti­cu­lier la DSPAP. C’est dans cette socié­té en perte de repères, dont la vio­lence au quo­ti­dien en est une des mani­fes­ta­tions, que nous devons sans cesse ana­ly­ser notre façon d’intervenir dans le domaine du SUAP car aucune inter­ven­tion n’est banale.

Pre­miere cere­mo­nie de pre­sen­ta­tion des jeunes au dra­peau de la bspp

Il fau­dra en paral­lèle, et j’y met­trai toute mon éner­gie, suivre de près la réa­li­sa­tion du plan de modernisation

2019, ce fut tout autant une manœuvre RH excep­tion­nelle en termes de recru­te­ment, avec un objec­tif atteint de 1 200 jeunes, et pour y par­ve­nir, il a fal­lu mettre tous les grou­pe­ments à contri­bu­tion. Je sou­haite dans ce cadre mettre à l’honneur le GFIS qui a été au ren­dez-vous mal­gré les condi­tions de tra­vail dif­fi­ciles, voire pré­caires du fort de Vil­le­neuve. Peu à peu, le sous-effec­tif RH se résorbe dans les grou­pe­ments mais c’est un mou­ve­ment qui peut paraitre lent. Sachez que sur ce front nous n’épargnons aucun de nos efforts. Je remer­cie l’ensemble de la chaine de com­man­de­ment dans les grou­pe­ments, les chefs de corps, les com­man­dants d’unité, les chefs de centre et les adju­dants de com­pa­gnie d’avoir géré avec un grand sens de l’économie la GTA pour per­mettre à la très grande majo­ri­té des pom­piers de Paris de res­ter dans leurs quo­tas. Je remer­cie aus­si vive­ment les com­man­dants d’unité et les chefs de sec­tions des com­pa­gnies métier du GSS, qui souffrent éga­le­ment d’un sévère défi­cit, de tenir le cap, de prio­ri­ser les efforts. C’est pour cela que nous devons encore ren­for­cer l’attractivité du métier, pour per­mettre à chaque SPP de mieux vivre son métier et de mieux vivre de son métier. Dans la droite ligne du plan famille vou­lu par la ministre des Armées, l’attribution de loge­ments aux capo­raux-chefs en est une expression.

2019 ce fut aus­si l’ouverture d’un centre de res­tau­ra­tion digne du XXIe siècle à LVV. La Bri­gade a plus de 80 emprises dont cer­taines sont dans un état de vétus­té avan­cé – je les connais et croyez bien que je relaye les pré­oc­cu­pa­tions des chefs de centres, des com­man­dants de com­pa­gnie et des chefs de corps auprès de nos auto­ri­tés de tutelle. Notre infra­struc­ture a besoin d’une aide substantielle.

2019, c’est enfin la pré­pa­ra­tion de l’avenir liée à la métro­pole du Grand Paris. À ce titre, je tiens à sou­li­gner ici l’implication par­ti­cu­lière du BPREV dans l’accompagnement des tra­vaux du grand Paris Express mais aus­si les tra­vaux du BEP et du BPO qui portent sur les condi­tions d’engagement, l’utilisation de la robo­ti­sa­tion ou encore les com­mu­ni­ca­tions en indoor sur inter­ven­tion ou sur l’emploi de la bru­mi­sa­tion dipha­sique comme moyen d’extinction nova­teur, sujet dont j’espère pou­voir par­ler de façon plus appro­fon­die prochainement.

Cette volon­té de pré­pa­rer au mieux l’avenir motive un plan de moder­ni­sa­tion d’environ 200 mil­lions d’euros qui a été défi­ni­ti­ve­ment adop­té par le conseil de Paris, en décembre, et qui per­met­tra à la Bri­gade d’offrir des condi­tions de vie et de tra­vail conformes à la hau­teur de notre engagement.

Dans ce cadre, 2020 sera l’année des évo­lu­tions et des défis.

Le prin­ci­pal défi de 2020 sera en par­ti­cu­lier de conti­nuer à jugu­ler l’augmentation du SUAP, mais aus­si de mettre en œuvre toutes les mesures pour réduire le nombre d’agressions sans oublier le déploie­ment de mesures visant à ce que notre modèle gagne en attrac­ti­vi­té. Vous le savez éga­le­ment, quelques déta­che­ments fer­me­ront pour por­ter l’effort RH sur les uni­tés d’incendie et de secours en prise directe avec la sur-sollicitation.

Il fau­dra en paral­lèle, et j’y met­trai toute mon éner­gie, suivre de près la réa­li­sa­tion du plan de moder­ni­sa­tion notam­ment sur le ren­for­ce­ment de notre capa­ci­té opé­ra­tion­nelle. Ce plan se tra­dui­ra éga­le­ment par l’acquisition de nou­veaux équi­pe­ments tant pour le domaine for­ma­tion que le domaine NRBC ou encore nau­tique mais aus­si pour le maté­riel uti­li­sé au quo­ti­dien par le plus grand nombre d’entre nous.

Ce plan de moder­ni­sa­tion c’est aus­si l’amélioration des condi­tions de tra­vail avec un effort par­ti­cu­lier sur nos casernes mais aus­si et sur­tout un effort sur le pou­voir d’achat avec des mesures concrètes visant à réduire les coûts de la vie que cha­cun connait.

Enfin ce plan de moder­ni­sa­tion c’est l’évolution de notre fonc­tion­ne­ment avec par exemple les e‑fiches bilan (l’expérimentation est d’ailleurs lan­cée avec l’hôpital Cochin), mais aus­si le lan­ce­ment du plan de trans­for­ma­tion numé­rique que j’attends de façon déter­mi­née pour sou­la­ger dura­ble­ment les échanges de flux et nos pro­cé­dures à l’échelle de chaque centre de secours.

En 2020, vous le com­pre­nez donc, nous pour­sui­vrons ces efforts visant en pre­mier lieu à conte­nir notre acti­vi­té. Je res­sens le besoin fort qui est le vôtre et sachez que les efforts de toute la chaine de com­man­de­ment sont concen­trés pour pré­ser­ver votre énergie.

Ces mesures de pré­ser­va­tion ne se feront pas au détri­ment de la sin­gu­la­ri­té de notre modèle. Nous main­tien­drons ce qui fait notre force et en par­ti­cu­lier, notre iden­ti­té, notre cohé­sion et la qua­li­té de notre pré­pa­ra­tion opérationnelle.

Ces mesures d’économies de notre poten­tiel se tra­dui­ront par des choix bud­gé­taires lourds ! La richesse humaine, votre poten­tiel, n’a pas de coût mais une valeur, elle est ines­ti­mable…. Nous ferons tout pour la pré­ser­ver ! L’état-major s’y applique tous les jours. A cet ins­tant pré­cis je salue le tra­vail de nos méde­cins d’antenne médi­cale de grou­pe­ment, de nos psy­cho­logues, le BSP, celui de nos assis­tantes socio-édu­ca­tives et du BCP-EH. Par leur atten­tion et leur impli­ca­tion au quo­ti­dien, ils per­mettent de solu­tion­ner de nom­breuses détresses internes en par­faite cohé­rence avec les éche­lons d’encadrement de proxi­mi­té et de redon­ner le goût des choses simples et de se battre pour des jours meilleurs.

Vous pou­vez être assu­rés de ma déter­mi­na­tion pour que les lignes bougent. La Bri­gade est notre atout, elle doit néan­moins s’adapter, et c’est à cette condi­tion qu’elle conti­nue de nous préserver.

Depuis le 1er jan­vier, j’ai tenu à ren­con­trer per­son­nel­le­ment une com­pa­gnie par grou­pe­ment afin d’incarner le col­lec­tif dans ces vœux et de for­ma­li­ser mon atten­tion à l’égard de cha­cun d’entre vous.

Je conclu­rai sur une note d’espérance en for­mu­lant cha­leu­reu­se­ment des vœux de cou­rage à ceux qui ne sont pas épar­gnés par les dif­fi­cul­tés de la vie et des remer­cie­ments envers ceux qui les accompagnent.

Que cette année 2020 soit riche et heu­reuse aux côtés de ceux qui nous sont chers et qui nous rendent meilleurs sous la pro­tec­tion de notre sainte patronne !

Vive la Brigade !

Vive l’armée de Terre !

Cere­mo­nie prise de fonc­tions du gene­ral Gontier
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