ITINÉRAIRE — Le colonel Féger raconté par son fils Philippe

Har­ry Cou­vin —  — Modi­fiée le 26 mai 2023 à 08 h 13 

Histoire — Le colonel Maurice Feger est le créateur de l’Association des œuvres sociales des sapeurs-pompiers de Paris. Son fils, Philippe nous raconte son parcours avant l’Adosspp.

« Mon père, Mau­rice Féger nait à Paris en 1896, d’un père garde répu­bli­cain et d’une mère au foyer. En 1895, son père est de ser­vice pour la dégra­da­tion du capi­taine Drey­fus. Pen­dant la céré­mo­nie, il récu­père les lunettes du capi­taine, tom­bées par terre. Drey­fus étant extrê­me­ment myope, il ne pou­vait pas les récu­pé­rer. Sa hié­rar­chie le ser­mon­ne­ra pour cet acte de bien­veillance. Ensuite, il devien­dra gen­darme dans le Loi­ret (45) où le jeune Mau­rice fera ses études.
Au col­lège, puis au lycée de Mon­tar­gis, grâce à une bourse d’état, il passe son bac et dans la fou­lée, passe le concours de St-Cyr sans avoir fait la pré­pa­ra­tion. Reca­lé, début juillet 1914, il part en Alle­magne pour amé­lio­rer son alle­mand d’où il assiste à toute la mobi­li­sa­tion de l’armée ger­ma­nique. Les évé­ne­ments pre­nant le virage que l’on connait, son hôte le met dans le train pour qu’il ne devienne pas pri­son­nier poli­tique. En fait, il prend le der­nier train pos­sible pour ren­trer sur la France. Ce train est arrê­té à 12 km de la fron­tière fran­çaise, mais il par­court le reste du che­min à pied et par­vient à reprendre un train pour Paris. Il avait juste 18 ans.
En arri­vant chez ses parents, son père, très ému, lui pose la ques­tion de son ave­nir : “Que vas-tu faire main­te­nant ?”
Bien qu’il ait la pos­si­bi­li­té de ren­trer au lycée Saint-Louis à Paris, il répond à son père : “ Je m’engage dans le 82e régi­ment d’infanterie de mon­tagne de Mon­tar­gis. Je vais à la guerre”.
Ain­si le seconde classe Mau­rice Féger com­mence la guerre qu’il fini­ra comme lieu­te­nant, com­man­dant de com­pa­gnie.
Après le conflit, son régi­ment sta­tionne dans les Ardennes, mais l’inaction lui pèse et il demande sa muta­tion. Et il l’obtient dans les com­pa­gnies saha­riennes au sud algérien.

En Algérie

Il y res­te­ra pen­dant deux ans et demi en tant qu’officier de l’administration ter­ri­to­riale du Saha­ra. Et là, il applique les prin­cipes du Maré­chal Lyau­tey, c’est-à-dire l’esprit du rôle social de l’of­fi­cier. À cette époque, en Algé­rie, il n’y a pas d’ad­mi­nis­tra­tion civile au Saha­ra, l’armée s’en occu­pait en même temps que le main­tien de l’ordre. Bien que pro­fon­dé­ment atta­ché au désert, son désir d’action reprend le des­sus lorsqu’il voit une annonce pour un concours d’officier pour entrer au régi­ment de pom­piers de Paris. Il tente le concours, il est reçu, brillam­ment et il intègre la 5e com­pa­gnie en 1921 au Tro­ca­dé­ro. Son pre­mier feu a été un feu de paille sur une char­rette. Une inter­ven­tion bien ori­gi­nale pour Paris !

Dans ses débuts, il par­ti­cipe au grand feu du Prin­temps, à la catas­trophe du tun­nel des Bati­gnoles. Il est vite repé­ré et est muté comme lieu­te­nant-ingé­nieur au ser­vice tech­nique en 1924. Il y res­te­ra jusqu’en 1931. Il arrive ensuite à la 4e com­pa­gnie où il offi­cie pen­dant la crise de février 1934 où des émeu­tiers marchent sur la chambre des dépu­tés pour ten­ter de l’envahir. Il est bles­sé avec les pom­piers qui ont pour ordre d’empêcher la tra­ver­sée du pont de la Concorde en repous­sant les mani­fes­tants avec leurs lances.
Ensuite, il revient au ser­vice tech­nique où il res­te­ra jusqu’à la guerre. Lieu­te­nant et adjoint au chef du ser­vice, le colo­nel Buf­fet à ses débuts, il lui suc­cè­de­ra. Il a alors, un rôle impor­tant pour la for­ma­tion des sous-offi­ciers, qu’il veut d’un haut niveau tech­nique ain­si que dans la remise en forme des règle­ments pour les éta­blis­se­ments rece­vants du public. Il est d’ailleurs à l’o­ri­gine des fameuses ouver­tures des portes vers l’extérieur et non vers l’intérieur comme le veulent les usages de l’époque. « J’ai plus peur de la panique que du feu » est son leit­mo­tiv sur cette réglementation.

Création de l’ADOSSPP

Pen­dant la Seconde Guerre mon­diale, très sur­veillé par les Alle­mands, il par­vient néan­moins à faci­li­ter cer­taines opé­ra­tions clan­des­tines. Mais dès 1944, il est affec­té à la tête des ser­vices sociaux du Régi­ment où nait l’idée de l’ADOSSPP pour venir en aide aux pom­piers de Paris en situa­tion pré­caire dans l’après-guerre.
Cette nou­velle asso­cia­tion va per­mettre d’acheter le domaine de la Fros­sar­dière (ndr : une action impos­sible sta­tu­tai­re­ment pour le Régi­ment) pour per­mettre aux enfants de pom­piers de par­tir en colo­nie de vacances.
Il fait d’ALLO 18, le jour­nal offi­ciel des pom­piers de Paris en 1948.
Sous son impul­sion, de nom­breuses ini­tia­tives de l’association ont per­mis de sou­te­nir les sol­dats du feu pari­siens dans leur vie fami­liale.
Une seule requête de son héri­tage a long­temps fait défaut au sein de l’association : la créa­tion du foyer du sapeur.
Un voeu désor­mais exaucé !

L’album


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