UN POMPIER, UN CS — Antoine au CS Auteuil

Raphaël Orlan­do —  — Modi­fiée le 6 mai 2025 à 10 h 57 

Web-série — Ancré dans l’histoire de la BSPP, le centre de secours Auteuil veille sur un secteur prestigieux de la capitale. CS historique, il a notamment été en première ligne lors de l’incendie de la rue Erlanger, l’un des plus marquants de ces dernières années. Affecté à Auteuil depuis 2021, le caporal-chef Antoine Sancey raconte son quotidien dans cette caserne où la cohésion et la camaraderie rythme chaque garde.

Bon­jour Antoine, pour­rais-tu te présenter ?

Bon­jour, je suis le capo­ral-chef Antoine San­cey, j’ai six ans de ser­vice. Je suis affec­té à la sixième com­pa­gnie depuis juin 2021, plus pré­ci­sé­ment au CS Auteuil. Je suis arri­vé dans ce centre de secours en tant que capo­ral-chef, mais j’avais réa­li­sé mon avan­ce­ment dans ma pre­mière caserne : le CS Rueil-Mal­mai­son.
Côté per­son­nel, je suis pac­sé. J’ai choi­si de me rap­pro­cher de Paris pour réduire mes dépla­ce­ments et rejoindre ma com­pagne. Nous vivons dans les Yve­lines, mais je suis ori­gi­naire de Besan­çon, dans le Doubs.

Quel est le pre­mier aspect posi­tif qui te vient en tête en pen­sant à ce CS ?

Les pre­mières choses qui me viennent à l’esprit sont la cohé­sion et la col­lec­ti­vi­té. On a un centre de secours assez aty­pique, avec la par­ti­cu­la­ri­té d’a­voir deux grands dor­toirs pour les mili­taires du rang et un dor­toir pour les sous-offi­ciers. Nous n’avons donc pas de chambres sépa­rées entre gra­dés et sapeurs, ce qui fait que l’on est vrai­ment tout le temps ensemble.
Bien sûr, cela a quelques incon­vé­nients en termes de som­meil ou d’intimité, mais beau­coup sou­lignent que cela ren­force la cohé­sion : tout le monde est inté­gré et cha­cun se connaît vraiment.

Auteuil c’est aus­si l’incen­die rue Erlan­ger, l’un des plus impor­tants des der­nières années donc for­cé­ment la caserne est char­gée d’histoire. Je ne vous cache pas que c’est impo­sant lorsque l’on arrive dans un CS qui a connu un tel enga­ge­ment opérationnel.

Quelles spé­ci­fi­ci­tés ou type d’inter’ pour ce secteur ?

Auteuil couvre un sec­teur assez aisé et pri­sé de Paris, avec une majo­ri­té de bâti­ments hauss­man­niens. Nous sommes dans un arron­dis­se­ment chic où se trouvent de nom­breuses ins­tal­la­tions spor­tives : le Parc des Princes, Roland-Gar­ros, le stade Jean Bouin, mais aus­si deux hip­po­dromes.
Ces lieux gèrent très bien leur affluence, donc nous y inter­ve­nons rare­ment. Mais ce sont des sites sen­sibles, avec un rayon­ne­ment inter­na­tio­nal : notre capa­ci­té d’intervention doit donc res­ter constante.
Même si nous n’a­vons pas de monu­ments majeurs dans notre sec­teur, c’est tou­jours un plai­sir d’intervenir ici. Cer­tains immeubles offrent des vues impre­nables sur la tour Eif­fel : on évo­lue dans un quar­tier char­mant et his­to­rique de Paris.

Quelle est l’intervention qui t’a le plus mar­qué dans ce CS ?

Un feu que j’ai vécu un an après mon arri­vée à Auteuil m’a par­ti­cu­liè­re­ment mar­qué.
C’était dans la nuit du 11 sep­tembre 2022. Nous par­tons pour un feu de chambre de bonnes au sep­tième étage, rue de Pas­sy. À notre arri­vée, on sait qu’il y a poten­tiel­le­ment deux occu­pants dans l’appartement, mais après nos recon­nais­sances, per­sonne ne répond et per­sonne ne se mani­feste aux fenêtres.

Avec mon ser­vant, nous atta­quons les flammes dans un appar­te­ment com­plè­te­ment embra­sé, en pen­sant mal­heu­reu­se­ment que, vu l’intensité de l’incendie, il est peu pro­bable de retrou­ver quel­qu’un en vie.
Une fois les flammes maî­tri­sées, nous ouvrons une petite porte déro­bée… et décou­vrons les deux occu­pants réfu­giés dans leur salle de bain, vivants ! Nous pro­cé­dons immé­dia­te­ment à leur sau­ve­tage avant de retour­ner par­faire l’extinction.
Quand j’y repense, c’est vrai­ment un miracle qu’il ne leur soit rien arri­vé. Pour nous, tout espoir sem­blait per­du en entrant.

Le len­de­main, alors que j’étais de garde au VSAV, j’ai recroi­sé par hasard cette mère et son fils, en par­faite san­té. C’est une inter­ven­tion qui res­te­ra gra­vée comme un puis­sant rap­pel de ne jamais perdre espoir.

Sou­ve­nir personnel/​cohésion le plus mar­quant dans ce CS ?

Si je devais quit­ter le CS, je gar­de­rais en mémoire toutes les petites cohé­sions impro­vi­sées : un repos, une fin de réserve, quel­qu’un pro­pose une acti­vi­té ou un verre, puis un autre se greffe… et on finit par se retrou­ver en grand groupe.
Ces moments n’ont pas de prix. Ils naissent natu­rel­le­ment et témoignent de la véri­table soli­da­ri­té qui nous unit.
Je retiens aus­si le fait que les rela­tions pro­fes­sion­nelles peuvent, au fil du temps, se trans­for­mer en véri­tables ami­tiés. Je pense que c’est cou­rant dans beau­coup de CS de la Bri­gade, mais pour moi, une vraie ami­tié, c’est aus­si pou­voir par­ta­ger son quo­ti­dien, ren­con­trer la famille de l’autre, visi­ter sa région…
C’est beau de se dire que tout cela com­mence dans un cadre pro­fes­sion­nel et devient une véri­table fraternité.


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